31 décembre 2016

"Au principe de toute action révolutionnaire il y a un acte de foi " (Roger Garaudy)



La véritable alternative à une religion opium du
peuple, ce n'est pas un athéisme positiviste, car le positivisme
ce n'est pas seulement le monde sans Dieu
mais le monde sans l'homme. La véritable alternative
c’est une foi militante et créatrice pour laquelle le réel
ce n'est pas seulement ce qui est, mais tous les possibles
d'un avenir qui apparaît toujours impossible à qui
n'a pas la puissance de l'espoir.
Ernst Bloch a eu le mérite de redécouvrir le fondement
nécessaire de tout marxisme vivant qu'il appelle :
« le principe de l'espoir ».
[…] Il n'est pas vrai
que l'on devient révolutionnaire simplement parce
qu'on est malheureux, ou simplement parce qu'on nous
a prouvé par voie démonstrative, « scientifique », la
nécessité du socialisme.
Il est fort utile au révolutionnaire d'avoir fait l'expérience
vitale du malheur, comme d'être capable d'esprit
scientifique, mais ni sa misère ni sa science ne l'ont
rendu révolutionnaire.
Au principe de toute action révolutionnaire il y a
un acte de foi : la certitude que le monde peut être
transformé, que l'homme a le pouvoir de créer du1
nouveau et que nous sommes personnellement responsables
de ce changement.
Pour Ernst Bloch, la certitude que la réalité n'est
pas seulement ce qui est mais ce qui naît d'un océan
de possibles est un héritage des religions. Ce qu'il
appelle une « métareligion ».
[…]Avoir la foi, c'est espérer. C'est-à-dire percevoir les
possibilités au-delà du réel immédiat. « L'espoir de
l'homme, c'est la chair de Dieu », disait Barbusse.
[…] Car si l'homme n'a pas de nature, mais une histoire,
cette histoire n'est jamais finie. Nous ne pouvons jamais
 être satisfaits. La foi ne peut donc pas être justification
 de l'histoire mais ouverture de l'histoire. Elle est
cette question qui maintient l'histoire en suspens.
La vie du Christ est l'exemple d'une vie de cette
qualité. Faite de décisions portant non sur tel ou tel
aspect de l'ordre social ou de la vie personnelle, mais
sur le problème unique des fins. Jésus n'est pas un révolutionnaire
cherchant à transformer les structures,
comme les zélotes de Bar Kochba. Il n'est pas non plus
un prêcheur de repentance comme Jean-Baptiste qui
agirait seulement sur les consciences. Il est l'homme
pleinement homme qui, en chaque action, nous enseigne
à viser les fins lointaines.

Roger GARAUDY
L’alternative
pages 122-123