31 janvier 2015

Mai 68, de Garaudy à Fromonteil

Des étudiants de Poitiers aux ouvriers de Châtellerault et vice versa

par Paul Fromonteil, vice-président communiste de la région Poitou-Charentes.
Il y a deux façons de remettre en cause la réalité de Mai 68 : l'attaque frontale de Sarkozy et la réduction des mouvements au seul aspect libertaire et gauchiste (le deuxième aspect alimentant le premier !).
Si l'on veut conserver le tranchant de Mai 68 il faut bien voir la dimension globale d'une crise profonde amorçant un tournant mettant en question un ensemble de données sociétales. Cela veut dire croiser - avec leurs diversités et contradictions - la révolte étudiante et la plus formidable grève ouvrière que la France ait connue.

30 janvier 2015

Garaudy à Poitiers

Roger Garaudy avait enseigné cinq ans à Poitiers

16/06/2012
Roger Garaudy fut prof de philo à Poitiers entre 1969 et 1973.
[...] Avant d'encourir les foudres de la loi, Roger Garaudy fut un universitaire apprécié. Professeur titulaire à Poitiers de 1969 à 1973, il y enseignait notamment la philo. « Il donnait des cours d'esthétique, sur la danse et les arts premiers, se souvient Thierry, l'un de ses anciens étudiants poitevins, A l'époque, c'était dans l'amphi Descartes. Ses cours affichaient complet. Il faisait le show, c'était brillant. On n'avait pas intérêt à arriver en retard au cours si on voulait trouver une place… »
[...]


Jean-Michel Gouin  (Extraits. Article source à lire en entier ici)
 

Dans "Le Monde", des compte-rendus du procès en appel des "Mythes fondateurs de la politique israélienne"


La condamnation de Roger Garaudy est alourdie en appel
LE MONDE | 18.12.1998

ROGER GARAUDY, auteur du livre Les Mythes fondateurs de la politique israélienne publié en décembre 1995, dont le contenu défendait les auteurs de thèses négationnistes (voir Le Monde du 18 octobre), a été condamné mercredi 16 décembre par la 11e chambre de la cour d'appel de Paris pour contestation de crimes contre l'humanité, diffamation raciale et provocation à la haine raciale. Roger Garaudy (85 ans), relaxé du délit de diffamation raciale pour son évocation d'une prétendue « omnipotence juive » devant le premier juge, a été condamné à une série d'amendes dont le montant cumulé se monte à 150 000 francs, systématiquement assorties de peines de prisons avec sursis, « fondues » dans la peine maximale de six mois d'emprisonnement. L'avocat de Roger Garaudy, MeIsabelle Coutant Peyre, a fait connaître l'intention de son client de se pourvoir en cassation. Pierre Guillaume, animateur de la « Vieille taupe », une officine de diffusion de textes négationnistes et premier éditeur de l'ouvrage, relaxé en première instance, s'est vu infliger six mois d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende.
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 De la prison avec sursis est requise en appel contre Roger Garaudy
LE MONDE | 30.10.1998

L'AVOCAT GÉNÉRAL de la onzième chambre de la cour d'appel de Paris a requis, mercredi 28 octobre, contre Roger Garaudy, une amende de 500 000 francs et une peine d'emprisonnement avec sursis. Il estime que l'antisionisme revendiqué par Roger Garaudy dans son livre Les Mythes fondateurs de la politique israélienne est instrumentalisé au profit d'un antisémitisme qui n'ose plus dire son nom depuis la seconde guerre mondiale. Selon lui, le délit commis par M. Garaudy relève de la « contestation de crime contre l'humanité » et de la diffamation raciale.
Comparant la loi Gayssot, qui réprime les délits de négation de crime contre l'humanité, aux lois de Vichy, l'avocate de Roger Garaudy, Me Isabelle Coutant Peyre, a estimé que la procédure constituait un procès politique. La dernière audience de ce procès doit se tenir mercredi 4 novembre.
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Jugé en appel, Roger Garaudy persiste à défendre, à la virgule près, les thèses de son livre contesté
LE MONDE | 16.10.1998
 ParNICOLAS WEILL

SANS DOUTE échaudé par l'atmosphère électrique qui avait prévalu lors du procès en première instance de Roger Garaudy, condamné le 27 février à un total de 120 000 francs d'amende pour « contestation de crimes contre l'humanité », le président Dominique Charvet, en ouvrant l'audience de la onzième chambre de la cour d'appel de Paris, mercredi 14 octobre, a prévenu qu'il avait l'intention d'examiner ce cas dans une ambiance paisible et d'avoir « peu de monde ». Outre l'exiguïté de la salle, la copie que le président faisait minutieusement prendre des questions, réponses et dépositions, contribuait à cette atmosphère refroidie.
Roger Garaudy a déclaré vouloir produire des « documents nouveaux » à l'appui de son livre contesté, Les Mythes fondateurs de la politique israélienne. De cet ouvrage, il ne retire toujours pas une virgule, même si l'examen du livre a donné lieu devant le tribunal à une accumulation d'approximations et d'erreurs de dates ainsi qu'à un étalage de connaissances de seconde main ou détournées, où l'histoire ne trouvait guère son compte.
Dans les cinq jugements rendus en février, la 17e chambre correctionnelle reprochait à Roger Garaudy d'avoir mis en cause « la communauté juive (...) à raison de son influence réputée excessive sur les médias et son pouvoir de ``manipulation`` de l'opinion publique ». C'est sur cet aspect qu'a insisté l'unique témoin, le philosophe Alain Finkielkraut, cité pour les parties civiles à l'initiative de l'association Avocats sans frontières représentée par Me William Goldnadel et Aude Weill-Raynal.
Rappelant l'ironie incrédule de Roger Garaudy en 1949, alors membre important du PCF, lorsqu'il fut question de l'existence des camps soviétiques lors du célèbre procès Kravchenko, Alain Finkielkraut a mis sur le même plan Les Mythes fondateurs de la politique israélienne et Les Protocoles des sages de Sion, un faux fabriqué il y a cent ans par la police russe qui prétendait apporter la preuve que les juifs conspiraient secrètement pour s'assurer de la domination mondiale et qui a nourri l'antisémitisme moderne.

 « ANTISÉMITISME IDÉOLOGIQUE »
L'un comme l'autre relèvent de l'« antisémitisme idéologique », a déclaré l'auteur de L'Avenir d'une négation (Seuil, 1982). « Quand on dit, a-t-il ajouté, que la solution finale ne devait pas être entendue comme un projet, on dit que les juifs sont des menteurs qui ont le pouvoir de faire entendre ce mensonge à la terre entière. Roger Garaudy n'oppose pas des faits aux faits. Il réédite l'argumentaire au nom duquel on a fait mourir les juifs. (...) Il n'est rien de plus offensant que d'expulser les survivants de leur malheur et les morts de leur mort. »
Esquivant quelque peu le débat sur la loi Gayssot qui réprime depuis juillet 1990 la contestation de crimes contre l'humanité, sur laquelle la défense de Roger Garaudy a essayé d'orienter le propos, Alain Finkielkraut a estimé qu'un prétoire lui semblait un lieu adéquat pour juger de la haine antisémite véhiculée par le discours négationniste. Un négationnisme auquel il ne voit pas grand avenir en Europe, mais qui, au regard du succès remporté par Roger Garaudy auprès de nombreux intellectuels arabes, pourrait progresser dans le tiers-monde.
Roger Garaudy, représenté naguère par Me Vergès et désormais par Me Isabelle Coutant Peyre, s'est empressé de rappeler que lui aussi tenait Le Protocole des sages de Sion pour un faux.
Exhibant les lettres de soutien qu'il a reçues dont celle du violoniste Yehudi Menuhin datée du 7 juillet 1998 il a invoqué derechef le soutien de l'abbé Pierre, via un texte du 18 juin 1996 dans lequel le fondateur d'Emmaüs s'en prenait au « mouvement sioniste avec ses puissants chefs » et ses « agents secrets, en France comme ailleurs ».
Arc-bouté sur les thèses défendues dans son ouvrage d'abord publié par la Vieille Taupe, l'éditeur des négationnistes, dont l'animateur Pierre Guillaume, était également sur le banc des accusés.

 « IL DOIT Y AVOIR UN DÉBAT »
Il a estimé que sur la question des chambres à gaz il doit « y avoir un débat », tout en ajoutant, sibyllin : « Je ne veux pas qu'on minimise les crimes de Hitler en les réduisant à l'une de ses méthodes. »
Dans son livre, après avoir porté le doute sur les témoignages et les historiens dits « exterminationnistes », qui en ont établi la réalité, Roger Garaudy citait abondamment le « rapport Leuchter », sorte de caution technique des négationnistes. A propos du marchandage avorté que les SS ont suggéré aux Alliés en 1944 l'échange de la vie d'un million de juifs contre des camions, tractations décrites dans le livre de l'historien Yehouda Bauer, Juif à vendre (Editions Liana Levi, 1996) , Roger Garaudy a cru bon de faire ce commentaire : « On sait qu'heureusement Hitler n'avait pas exterminé tous les juifs puisqu'il pouvait en proposer un million. »
Deux autres audiences sont prévues, les 21 et 28 octobre.


Débat en Tunisie après le décès de Roger Garaudy. "Historien et chercheur de vérité"



L’homme de toutes les vérités
 Le 13 juin 2012, après près d’un siècle d’existence, Roger Garaudy cessait d’être de ce monde. Présenté par les médias français comme «le dernier des négationnistes», il est indéniablement bien plus que cela. Le moins que l’on puisse dire sur ce penseur, c’est qu’il fut un témoin de son siècle... et pas de n’importe quelle manière. Son témoignage est, en effet, accompagné par une recherche infatigable de la vérité, qu’il a pensé trouver tour à tour dans le catholicisme, dans le marxisme puis dans l’islam, tout en restant un fervent défenseur de l’ouverture et du dialogue. Sa contribution par la recherche sur le sionisme et sa révision de la shoah lui ont valu de tomber aux oubliettes dans le monde occidental. Tous ses livres y ont été retirés. Pourtant, sa valeur est reconnue par ses nombreux admirateurs dans le monde. Parmi eux, un groupe d’étudiants tunisiens qui ont désiré lui rendre hommage, avec la contribution du centre Cheikh Fadhel Ben Achour pour la culture et les arts « Ettanwir» à La Marsa. L’espace a accueilli, mercredi dernier, une conférence portant le  nom «Roger Garaudy: l’historien et le chercheur de vérité». 

Le choix a été porté sur Hédi Timoumi, Fethi Kassemi, Ali Manjour et Mohsen Mili comme intervenants. Chacun a mis la lumière sur un aspect du parcours de Roger Garaudy, que ce soit sa vie, sa pensée ou ses œuvres. Tous étaient d’accord que Garaudy a su garder un recul nécessaire et un éveil critique tout au long de ce parcours hors du commun. De nombreux incidents en témoignent en effet. Ainsi, il est passé du statut de directeur d’études et de recherches marxistes à l’expulsion du parti communiste français, en 1970. De même, sa lecture objective de la pensée islamique et son appel à «désaoudiser l’islam» dans son ouvrage «Mon tour de siècle en solitaire», lui ont valu la colère des dirigeants saoudiens qui lui ont ouvert les portes de leurs centres de recherche aux débuts de sa conversion, dans les années 80. Dans ce sens, le docteur Hédi Timoumi affirme que Roger Garaudy avait une vision progressiste de l’islam et qu’à l’image de nombreux chercheurs qui se sont convertis, il l’a fait grâce à la pensée soufie qui prône des valeurs universelles, étant lui-même un penseur universel. Tout en ajoutant que les Arabes ont applaudi le rationalisme qui a caractérisé ses thèses sur la révision de la shoah et l’origine commune des juifs, il a mentionné qu’ils ont dans le même temps repoussé ses travaux sur l’islam, quand ceux-ci venaient à l’encontre de leur compréhension et de leur interprétation de la religion. Une contradiction face à laquelle le penseur est resté fidèle à son rationalisme et aux valeurs en lesquelles il croit. Ces dernières ont été au centre de l’intervention du chercheur et philosophe Mohsen Mili, auteur notamment d’une thèse de doctorat sur Garaudy. Selon lui, le penseur défunt représente l’exemple type du philosophe responsable et attaché à des valeurs comme la critique, le dialogue, l’ouverture, l’universalité et l’espoir, lui qui a toujours cherché le sens dans la foi. Ses ouvrages sont non seulement le reflet de sa pensée, mais surtout des principaux courants qui ont traversé son siècle. «La pensée se construit en interaction avec le parcours», a-t-il expliqué lors de la conférence. Celui qui a passé toute sa vie à lui chercher un sens est également le père d’une philosophie actuelle, qui s’inscrit dans son époque et dans l’acte, sur le terrain. Il a même considéré les échanges trop abstraits entre les philosophes de son temps comme des «mots croisés», rien de plus. A la différence de ceux-là, il essayait d’attirer l’attention sur la contribution des différentes cultures et civilisations à l’humanité, en mettant les capacités de l’Homme au centre de son intérêt.

Quant à ses recherches sur le sionisme et les mensonges historiques sur lesquels il est basé, les valeurs de ses travaux sont d’une importance telle que le lobby sioniste européen a tout fait pour mettre de l’ombre dessus. Ses thèses concordent avec celles du mouvement des néo-historiens en Israël, selon Hédi Timoumi. Le médecin et militant Fethi Kassemi, dernier intervenant de la conférence, a d’ailleurs consacré son allocution à ce thème, en citant les ouvrages consacrés par Garaudy à l’Etat et à la pensée sionistes. «Il était contre l’idée du peuple élu», explique Kassemi qui a attiré l’attention sur le vrai apport de Roger Garaudy dans ce champ de recherche, affirmant qu’il ne s’est pas contenté de citer les faits historiques mais de chercher et d’analyser les idées et contextes qui se cachent derrière. Et parmi ce qu’il a prouvé, le complot entre le mouvement sioniste et les nazis, pendant la Seconde Guerre mondiale, au prix d’un génocide à l’encontre de communautés juives non puissantes, alors que l’argument de la shoah a été plus tard utilisé pour légitimer la création de l’Etat d’Israël.
Nombreuses sont les vérités que Roger Garaudy a exposées à la lumière du jour, cherchant peut-être sa propre vérité. Le parcours de cet homme reste, sans aucun doute, un mystère qui ne peut être élucidé que par la lecture de son œuvre, une lecture comme il l’aurait voulue, dans l’ouverture et l’universalité.

Narjès TORCHANI
Le : 21-07-2012
http://www.lapresse.tn/21072012/52919/lhomme-de-toutes-les-verites.html 

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Tunisie, des universitaires analysent la pensée de Roger Garaudy

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Publié le Vendredi 20 Juillet 2012
Roger GaraudyUne conférence s’est tenue à Tunis sur le défunt penseur et philosophe, Roger Garaudy, sous le thème "Roger Garaudy : la science de l’histoire et la recherche de la vérité". Des chercheurs, historiens et activistes des droits de l’Homme ont livré des réflexions sur la vie de ce philosophe français musulman, ses idées et sa relation avec l’Islam, l’Occident et les Arabes.

Cette conférence visait à faire connaître la vie et la pensée de celui qui a servi l’Islam, la nation arabe et la cause palestinienne à travers ses livres, plus d’une cinquantaine.

Hédi Taïmoumi, professeur de civilisation arabe à l’université tunisienne, a évoqué "la rationalité de Roger Garaudy qui a critiqué la pensée occidentale selon une approche cartésienne, et a mis à nu le sionisme d’une manière scientifique, avant de se tourner vers l’Islam auquel il s’est converti et en a présenté une lecture progressiste".

Les Arabes et les musulmans ont perdu un grand esprit qui a soutenu leurs causes et leur religion, en présentant  une lecture critique de l’Islam qui lui ôte certaines interprétations erronées qui lui ont été imputées, a-t-il dit en substance.

"Garaudy avait appelé les musulmans à accepter l’Etat civil et à revoir certaines pratiques prétendument inspirées de l’Islam. Chose qui lui a attiré les critiques de ceux-là mêmes qui ont applaudi sa conversion à l’Islam et ses positions hostiles à l’occident. Certaines parties ont même appelé à sa circoncision alors qu’il avait 80 ans", a déploré l’universitaire tunisien. "Notre refus des idées de Garaudy sur l’Islam progressiste et sa lecture moderne de l’Islam l’a poussé à se recroqueviller sur lui-même, jusqu’à qu’il soit mort en étant abandonné par tous, de l’orient à l’occident, car, il a fait valoir son esprit libre".

Selon Mohsen Mili, professeur de philosophie et spécialiste de la pensée de Garaudy, "Roger Garaudy incarnait la pensée du 20ème siècle dans son ensemble, avec ses évolutions, ses remises en cause, ses échecs, ses victoires et ses tournants, son attachement à la raison lui a beaucoup coûté, au point que la France n’a trouvé un autre qualificatif pour annoncer son décès que de dire que le dernier des négationniste est mort".

Vue de la conférence sur Roger Garaudy, Photo al-Jazeera. La bataille de Garaudy avec le sionisme a commencé avant qu’il ne publie aucun livre là-dessus,  à l’issue de l’article qu’il a publié dans la presse française et qui l’a conduit en justice. S’il avait gagné l’affaire, Garaudy est entré dans une bataille rude avec les institutions françaises, c’est qu’il a été boycotté par toutes les maisons d’édition, ce qui l’a incité à éditer ses livres à ses propres frais ou à se diriger vers les maisons d’édition libanaises, a dit de lui Ali Manjour, activiste des droits de l’Homme et écrivain.

Manjour a lié les positions de Garaudy au carnage de Sabra et Chatila, et à la sauvagerie du sionisme, avec un soutien européen indéfectible. A ses yeux, l’écriture sur le sionisme a connu deux périodes : l’avant et l’après écrits de Garaudy. "Roger Garaudy a constitué un tournant important dans l’histoire du sionisme et sa lecture, car il fait ressurgir les fondements du sionisme, celui-ci n’a pas commencé avec Theodor Herzl, mais a connu ses débuts embryonnaires bien avant, c’est ce qu’a dévoilé Garaudy, en faisant ainsi exploser une bombe intellectuelle".

Garaudy n’était pas un philosophe isolé, mais il tournait en dérision l’image du philosophe classique, car la philosophie n’est pas venue d’après lui pour comprendre la réalité selon la vision de Hegel, mais pour changer la réalité, de nature changeante, comme le dit Mohsem Mili.

Ali Manjour a évoqué le courage de l’homme qui a critique le sionisme, en considérant la loi criminalisant le négationnisme comme la plus grande faute de la France. "Garaudy était parmi les premiers penseurs qui ont révélé les mythes fondateurs de l’Etat d’Israël, celui qui a refusé la notion du peuple élu, des sujets considérés comme des lignes rouges pour la pensée occidentale. Le philosophe français s’est mis dans la gueule du loup et sa vie était des  plus menacées dans le monde."

Les conférenciers tunisiens ont été unanimes à dire que la philosophie de Garaudy est "actuelle et moderne". "Sa contemporanéité réside dans le fait que c’est une philosophie qui incite à l’action, un aspect sui generis à l’esprit libre. Garaudy était le modèle du philosophe engagé, responsable, cultivé qui veut changer et ne se limite pas à comprendre".

Les participants ont mis l’accent sur la valeur de la critique dans la pensée du philosophe français, c’est qu’il a commencé par l’autocritique, pour aboutir à la critique de la religion à laquelle il s’est converti, en passant par la critique de la pensée occidentale et de la religion chrétienne.

"C’est son esprit libre qui l’a poussé à rompre avec le parti communiste français. S’il avait décrit cette rupture de douloureuse l’ayant incité à tenter de se suicider, il a fini par choisir d’une manière irréversible  le chemin de la raison".

Le fait que les révolutionnaires algériens n’aient pas tiré sur lui un jour, car c’était un homme désarmé, l’avait beaucoup influencé et a libéré son esprit de toute idéologie dogmatique. Il a échappé au joug de l’appartenance ethnique, religieuse et intellectuelle pour être tout au long de sa vie, un partisan de l’homme où qu’il soit, l’épisode de sa vie dédié aux arabes et musulmans reste le point le plus lumineux de son expérience.
Article source: ici




29 janvier 2015

La "poétique du communisme"

1949. Garaudy avec Pablo Neruda

  Aragon, Eluard, Neruda, Hikmet furent les amis de Roger Garaudy. Ce dernier a souvent cité ces vers de Nazim HikmetSi je ne brûle pas,
                     si tu ne brûles pas,
                     si nous ne brûlons pas,
                     comment les ténèbres

                     deviendront-elles clarté ?  NDLR         

Nazim Hikmet. 1902-1963

 

Le siècle des poètes communistes

Ai Qing, le grand poète chinois d'après la révolution
Ai Qing, le grand poète chinois d'après la révolution
Le XXe siècle fut le siècle des poètes communistes. Le nombre de poètes, parmi les plus grands, qui furent communistes, parfois pendant quelques années mais souvent toute leur vie, avec ou sans carte, est si important qu’il mériterait d’être remarqué. Vladimir Maïakovski, Louis Aragon, Paul Eluard, Bertolt Brecht, Tristan Tzara, Pablo Neruda, Cesar Vallejo, Nicolas Guillen, Nazim Hikmet, Yannis Ritsos, Rafael Alberti, Roque Dalton, Jacques Roumain, Aï Qing, Nguyen Din Thi, Edoardo Sanguineti, Hugues MacDiarmid, Mahmud Darwich, Samir Al Qassim, Jack Hirschman… Et je pourrais en citer beaucoup d’autres.


La raison en tient sans doute à ce que j’appelle la "poétique du communisme".

27 janvier 2015

Tout tableau est un autoportrait. Par Roger Garaudy



FRÉDÉRIC BIRR - JEAN DIEZ    AUTOPORTRAITS - INTRODUCTION DE ROGER GARAUDY


L'Autoportrait
par
Roger Garaudy
Tout tableau est un autoportrait : il représente d'abord celui qui l'a créé : avant d'être un paysage, une peinture d'histoire, une nature morte, le visage d'un autre, une scène de genre ou une composition abstraite, il « représente», — au sens où on le dirait d'un ambassadeur, mais avec une exigence infiniment plus haute de fidélité profonde aux intentions les plus secrètes, et d'expression de la totalité vivante de celui qui a confié le message, — il représente le créateur dans l'acte même de sa création cristallisée en une image.
Même CANALETTO, utilisant un prisme de cristal pour donner une précision documentaire à sa vision des édifices de VENISE ou de LONDRES, porte témoignage, en chacune de ses oeuvres, de son voeu le plus intime, de n'être qu'un miroir du monde, transparent aux plus fines ciselures d'un monument. Et par là-même est dit son être fondamental : plus que son visage, son rapport vécu non pas seulement avec la nature mais avec un monde reconstruit selon les plans humains, celui des architectes ; la relation qui s'établit en lui, en une sorte de soumission amoureuse au réel, entre les formes fugaces créées de main d'homme et l'éternité dans laquelle il le fige dans le cristal de lumière d'un beau ciel : lorsque l'on voudra reconstruire dans VARSOVIE effacée du monde, par les destructions d'HITLER, l'une des plus exquises places de la ville, c'est à partir de l'image qu'en avait saisie CANALETTO deux siècles et demi auparavant. L'on refaisait ainsi à l'envers le chemin de l'artiste pour faire revivre la réalité à partir des songes.

24 janvier 2015

"Le message de l'islam", par Roger Garaudy


Dans ce petit fascicule qu’est «Le message de l’islam » paru aux éditions El Borhane, Roger Garaudy a montré, preuves à l’appui, la beauté et la grandeur de la parole divine rapportée par le Prophète Mohamed.  
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Bien entendu, l’auteur commence par opposer aux malentendus et «malentendants» une première approche sur l’essence même du mot islam, il écrit : «Islam signifie soumission volontaire à Dieu, ce qui est le dénominateur commun de toutes les religions révélées : juive, chrétienne, musulmane … depuis Adam, le premier homme.»
Et de citer T. Ramadan dans cette autre interprétation : «Dans l’islam, il y a cette notion de l’istislam, c'est-à-dire de se donner à Dieu, de se soumettre, mais il y a également la notion de salam, c’est-à-dire paix.»
«Le message de l’islam» est plus que jamais d’actualité avec les retombées négatives qu’ont engendrées les attentats «islamistes» commis contre des journalistes et des citoyens au cœur de la capitale française. Depuis cette tragédie, jamais la religion musulmane n’a été autant stigmatisée par un grand nombre de Français et d’Occidentaux, parce que des individus, exclus dans une obscure marginalité, rejetés par leur société, ont commis l’irréparable, le renouveau de l’islam apparaît comme une menace universelle. C’est une bénédiction pour une certaine presse occidentale manipulant délibérément peur, méfiance et effroi dans la conscience collective européenne. Parcourir les onze chapitres du livre, c’est interpeller pour un nouveau regard empreint de discernement. C’est se soustraire aux préjugés en lisant les réflexions émanant d’un grand érudit, un islamologue et philosophe, lequel souligne : «Nous ne considérons point cette religion telle quelle est aujourd’hui, mais à travers ce qu’elle apporta à l’humanisation de l’homme et ce qu’elle peut apporter encore…», et de rappeler les croyants à une relecture contemporaine du Coran sur un certain affaiblissement des préceptes «…si l’on ne se contente pas de réciter des fragments du Coran, toujours les mêmes, triés depuis mille ans, mais si on relit le message dans sa totalité organique, vivante, si l’on ne confond pas le Coran parole divine de la révélation avec la parole humaine des traditions…, ainsi seulement l’islam reviendra vivant, universel, ouvert à tous…» Parmi les grandes lignes de l’éthique islamique évoquées, on citera «la vision dynamique du monde dans le Coran», «le Coran donne à la raison toutes ses dimensions», «vers une conception islamique du développement et «les femmes dans le Coran». Pour revenir à la chari’a, qui fait couler encore beaucoup d’encre, comme étant un droit archaïque, contradictoire avec les droits de l’homme et le monde contemporain, Garaudy, que les grands débats sur le droit musulman n’ont pas laissé indifférent, manifeste ainsi sa pensée en lançant un appel à une ré-interprétation des textes juridiques, conforme au monde contemporain : «Pourquoi cette chari’a, cette loi de Dieu, ne rayonnerait-elle pas sur le monde ? Pourquoi les peuples musulmans, même libérés du colonialisme, demeurent-ils objet et non sujet agissant, créateur de l’histoire ? Parce que cette loi, cette chari’a a été défigurée, arrêtée dans son développement vivant, dès les premiers siècles de son histoire…quelle que soit la richesse de la tradition, de la Sunna du Prophète, des grands exégètes et des grands jurisconsultes du passé…nous ne pouvons pas laisser occulter la parole divine par la parole humaine. »
Est-il besoin de rappeler que comme la Bible ou la Torah, le Coran apporte un message divin universel et de parler de la destinée éternelle de sa créature : «Nous sommes à Dieu et vers lui nous retournons.»

23 janvier 2015

La Question palestinienne et la Responsabilité Internationale (1983)



Groupe d'Etude sur le Moyen-Orient
Genève, août 1983

La Question palestinienne et la Responsabilité Internationale

" On porterait gravement atteinte aux principes élémentaires de l'équité en n'accordant pas à ces innocentes victimes * du conflit le droit de retourner chez elles alors que, par ailleurs, les immigrants juifs pénétreraient  en grand nombre en Palestine et pourraient même menacer de prendre définitivement la place des réfugiés arabes dont les familles sont installées dans le pays depuis des siècles. "
Comte Bernadotte (1948)

22 janvier 2015

A Bernard Maris

« Et si l’inutilité, la gratuité, le don, l’insouciance, le plaisir, la recherche désintéressée, la poésie, la création hasardeuse engendraient de la valeur ? Et si les marchands dépendaient – ô combien ! – des poètes ? Et si la fourmi n’était rien sans la cigale ? Voici venu le temps d’affirmer, contre les économistes, que l’inutile crée de l’utilité, que la gratuité crée de la richesse, que l’intérêt ne peut exister sans le désintéressement. »

21 janvier 2015

Y a-t-il un péril islamiste? Colloque du Mans en 1993



L'Humanité
Jeudi, 16 Décembre, 1993

Pour beaucoup de participants, dont des orientalistes et chercheurs de renom, le péril vient surtout de la misère du monde et concerne les sociétés musulmanes elles-mêmes.

DIFFICILE d'imaginer thème d'une actualité plus brûlante que ce «péril islamiste» dont on a débattu pendant trois jours au palais des congrès et de la culture du Mans (1), sous la présidence d'Alain Gresh, journaliste au «Monde diplomatique». Thème mobilisateur si l'on en juge par l'affluence qu'il suscita.

Maxime Rodinson, de l'Ecole pratique des hautes études, ouvre le feu. Il montre que les démêlés entre le monde musulman et l'Occident ne datent pas d'hier (de la chute de Grenade aux guerres d'indépendance en passant par les Croisades et la conquête coloniale). A propos de la manière différente de concevoir le monde, Maxime Rodinson estime qu'un moment très important se situe au XIXe siècle, «dans le ralliement de l'Occident à l'idée de bonheur terrestre». A partir des révolutions européennes «s'est répandue l'idée de formuler des recettes de bonheur universellement valables». Or, «l'idée que l'islam recèle des recettes pour construire sur terre une société idéale, harmonieuse, où il fait bon vivre, existe chez les musulmans depuis l'époque du prophète Mohamed». A tort, à en juger par la violence qui régnait alors et qui fit que trois des quatre successeurs du prophète moururent assassinés. C'est pourtant cette «utopie islamique» qui renaît aujourd'hui sur les décombres des expériences ratées. Voyant leur sociétés péricliter alors que l'Occident prospérait, les musulmans ont essayé - pas toujours de leur plein gré - les recettes importées d'Europe. «Mais à l'essai ni le parlementarisme ni le socialisme n'ont satisfait les peuples. Tous deux ont abouti à la corruption.»

Une maladie de l'islam
Maxime Rodinson se dit «très sceptique» à l'égard de ce qu'il appelle «la nouvelle mouture de l'islamisme» et ses promesses. «Cela fait quatorze siècle que, dans les pays musulmans, le pouvoir est plus ou moins régi par l'islam. Pourquoi n'a-t-il pas donné de meilleurs résultats?» Il renvoie pour finir à la thèse de l'historien britannique Arnold Toynbee: «Les empires s'effondrent sous les coups du prolétariat intérieur ou du prolétariat extérieur (ce qu'il appelle «les barbares»)» et conclut: «Il y a aujourd'hui un nouveau «péril barbare», surtout pour les habitants des pays musulmans eux-mêmes.»
Le dernier orateur, Roger Garaudy, conclura sur une idée proche. Pour être devenu musulman, il n'en est pas pour autant un «islamiste». «L'islamisme, dit-il, est une maladie de l'islam» et l'intégrisme «une réaction au colonialisme». Il montre dans quelles conditions de catastrophe économique pour le tiers-monde - dont fait largement partie le monde musulman - se propage cette «maladie». «Tout ce qu'on propose aujourd'hui aux immigrés du tiers-monde, c'est de passer du monde de la faim au monde du chômage», dit-il.
Comment se débarrasser de la maladie de l'islamisme? En tuant les malades ou en supprimant la cause du mal? Pour Roger Garaudy, la réponse ne souffre pas d'hésitation. «Aujourd'hui, nous vivons dans un monde privé de sens, où l'homme est réduit à son rôle de producteur et de consommateur, où seul a droit à la démocratie celui qui a accès au marché. La seule solution est de rendre solvables ceux qui ne le sont pas.»
François Burgat, chercheur au CNRS, en poste au Caire après avoir travaillé en Algérie (2), voit dans les réactions à l'islamisme la peur que suscite chez les Occidentaux «la remise en cause de leur monopole idéologique». Pour lui, «la ré-islamisation de sociétés, où l'Occident avait été un peu trop présent, correspond à une récupération d'identité». Le processus se produit, de plus, dans des régimes usés, souvent ressentis comme illégitimes ou corrompus (Egypte, Algérie), qui ont porté atteinte de manière violente à la culture musulmane (le shah en Iran ou Nasser coupant les barbes sur la place publique) et qui n'ont laissé se développer aucune autre alternative.

Le cas de l'Algérie.
A propos de l'Algérie, François Burgat estime que le soutien de l'Occident à l'interruption du processus électoral est grave pour l'avenir car il montre une fois de plus que «l'Europe défend des valeurs prétendument universelles, mais en réalité à géométrie variable: on respecte le verdict des urnes, sauf quand ce qu'il y a au fond des urnes nous déplaît». Résultat: une double radicalisation (de l'Etat et des islamistes) dont il pense qu'il faudra bien sortir.
Evoquant lui aussi l'Algérie, Roger Garaudy estime que «l'initiative de la violence revient à ceux qui ont interrompu le processus démocratique». «Les «démocrates», qui avaient demandé des élections libres ont applaudi à leur interruption par les militaires.» Il rappelle que le noyau dur terroriste, les Afghans, a été formé et financé par la CIA pour combattre les Soviétiques. Et aussi que l'Algérie a 26 milliards de dollars de dettes. «Voilà le terreau sur lequel se développe l'islamisme, conclut-il. On ne peut pas se contenter de la répression. Il n'y a pas d'autre choix que le dialogue ou la guerre. Maudit soit celui qui choisit la guerre.»
Le chercheur américain Kenneth Brown, spécialiste du Maroc, analyse le rôle joué par les Oulémas - les docteurs de la foi musulmane - dans la cohésion des sociétés islamiques. Intermédiaires entre le pouvoir et la population, ils font tout pour éviter ce qui est pour eux le mal absolu: la «fitna» ou chaos. Pour cela, tout est permis, même l'obéissance à un pouvoir tyrannique. Il prêchent donc une théorie de la soumission qui sied particulièrement aux pouvoirs en place, que ce soit au Maroc ou en Arabie Saoudite.
Le cas de ce dernier pays, où la secte fondamentaliste des Wahhabites impose sa dictature depuis 1932, est abondamment cité. Roger Garaudy note: «Le pouvoir peut y couper autant de mains qu'il veut, emprisonner ses opposants et opprimer les femmes, cela ne l'empêche pas d'être accueilli à bras ouverts par le club des défenseurs de la démocratie.» Etats-Unis en tête, bien sûr. «Pourtant, dit-il, il alimente à travers le monde toutes sortes d'intégrismes. Mais on ne l'a jamais inscrit sur la liste des pays terroristes.» François Burgat rappelle «le massacre de 9.000 fidèles dans la mosquée de La Mecque avec l'assistance technique et humanitaire des services spéciaux français».
De la salle, Abraham Serfaty affirme qu'Hassan II a entrepris une «dépersonnalisation du Maroc comparable à celle du shah en Iran». «La tyrannie de Hassan II est si évidente que toutes les forces, aujourd'hui, s'unissent contre lui et notamment le mouvement national marocain héritier de Mohammed Abdou.»
Nombre d'orateurs se réfèrent à ce penseur réformateur et moderniste. Et même Tarek Ramadan, professeur à Genève, petit-fils du fondateur du mouvement des Frères musulmans, Hassan el-Bannah. Il se fait le défenseur d'un islamisme qu'il décrit comme un «engagement social». «Nous voulons assainir la société par un programme de travail à la base.» Il dénonce une conception figée de l'islam qui applique des jurisprudences (fiqr) anachroniques (couper la main des voleurs ou interdire au femmes de conduire) au nom de la Charia. «Il faut tout revoir, dit-il. Nous n'avons jamais dit qu'il fallait jeter la démocratie à la poubelle.» Ni l'Iran, ni le Soudan, ni l'Arabie Saoudite ne peuvent servir de modèles, dit-il. Mais il doit bien reconnaître qu'un Etat islamique démocratique reste à inventer.

La fin de la guerre?
Ce n'est certainement pas l'Iran qui en donne l'exemple. L'expérience iranienne sert pour tous de repoussoir. Deux intellectuels iraniens, Farah Khosrokhavar et Fariba Abdelkhak, affirment que la révolution islamique fut d'abord une réaction à la modernisation autoritaire et oppressive imposée par le shah. Selon eux, la société iranienne est en train de conquérir «une certaine autonomie» vis-à-vis du pouvoir des mollahs. Pour Farah Khosrokavar, «on est arrivé à l'étiage du désespoir et une nouvelle société civile en gestation apparaît dans laquelle l'islamisme radical n'a presque plus de partisans».
C'est aussi l'avis d'Olivier Roy (3). «La guerre est finie, mais on ne le sait pas encore, dit-il. Après la guerre du Golfe, quelle menace stratégique peut venir du monde musulman. Quel pays musulman peut tenir tête à l'Occident? Le courant islamiste est plus défensif qu'offensif. C'est lui qui subit l'agression culturelle de l'Occident. Et en Europe, c'est plutôt à la communauté musulmane de se sentir menacée.


Une recherche d'identité
Une conclusion qui rejoint celle du professeur israélien Emmanuel Sivan, conseiller du premier ministre Yitzhak Rabin pour les affaires islamiques. «L'islam politique, dit-il, n'existe pas. C'est la réaction à un danger qui vient d'Etats souvent populistes. Il s'agit d'une lutte interne aux pays musulmans eux-mêmes.» Il y voit une contre-attaque de la société civile musulmane contre les agressions qui l'ont privée de son autonomie traditionnelle par rapport à l'Etat. Celle-ci a été remise en cause au XIXe siècle, avec l'irruption de modèles importés d'Europe, en Egypte précisément, par le sultan Mohamed Ali, ancien esclave albanais devenu mamelouk.
Chacun semble pour finir sur l'idée qu'il y a dans la «ré-islamisation» une «recherche d'identité» sur fond de désespoir. Mohammed Arkoun, professeur d'histoire de la pensée islamiste, y voit davantage encore: «Une recherche de sens» face à un monde qui a perdu ses valeurs, et notamment le sens du sacré. Un monde où il faut réapprendre «la disputation» - étude, et connaissance par le débat d'idées qui permettait autrefois dans la tradition islamique la «transgression sans violence». Une pratique de haute culture aujourd'hui oubliée. C'est avec elle qu'on renoué pendant trois jours les participants au colloque du Mans. Pour conclure avec Alain Gresh, que la démocratie laïque à la française a du bon quand elle permet ainsi d'avancer dans la connaissance de l'autre.

(1) Les débats, présidés par Alain Gresh, avaient été organisés par l'association «Les Carrefours de la pensée», le journal «le Monde diplomatique», la Ligue nationale de l'enseignement et l'université du Maine.
(2) Il est l'auteur de «l'Islamisme au Maghreb» (Karthala).
(3) Chercheur au CNRS, auteur de «l'Echec de l'islam politique».

FRANÇOISE GERMAIN-ROBIN