29 novembre 2014

Pour un dialogue des civilisations. سلسلة زدني علما،



POUR UN DIALOGUE DES CIVILISATIONS سلسلة زدني علما، 1

في سبيل حوار الحضارات POUR UN DIALOGUE DES CIVILISATIONS سلسلة زدني علما، 1
Material TypeكتابLanguageعربي
Titleفي سبيل حوار الحضارات POUR UN DIALOGUE DES CIVILISATIONS سلسلة زدني علما، 1 Author(S)روجه غارودي عادل العوا (مترجم)
Publication Dataبيروت: منشورات عويدات Publication Date1986
EditionNAPhysical Description303 ص
Subjectالتاريخ العامSubject Headingsالحضارة التاريخ الحضارة الاسلامية
ISBNNACopiesNA
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Le mythe fondateur du capitalisme s'effondre

Reprise d'un article de CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

Le mythe est essentiellement le fondement paralogique et paradoxal que dispensent les chefs hiératiques et laïques des sociétés en crédo à la collectivité pour la conduire selon leurs propres intérêts de classe ou de caste. D’où, la vie « rationnelle » des hommes en société, est menée par suggestion selon des principes échappant à toute critique parce que présupposés comme axiomatique nécessairement et naturellement surlogique transcendant la raison.

Le mythe fondateur du capitalisme, la mobilité sociale par le travail et la propriété que tous peuvent acquérir s’ils travaillent, quoique copieusement démenti depuis les débuts du capitalisme moderne, subit donc son plus terrible revers avec la récente crise. Car la précarité des classes moyennes s’y est cuisamment avérée à travers la paupérisation en masse des professionnels et employés. La face de crise permanente du système capitaliste notamment anglo-saxon imposé au monde où l’investissement des petits et moyens entrepreneurs est gravement précarisé par les normes du crédit imposé sauvagement au monde contemporain par l’explosion de la finance et le règne féroce des grandes banques privées, menace de ruine tous les rudes travailleurs crédules qui voient encore dans le travail, un moyen d’affirmation sociale et de transfert de classe. La finance étaie une quasi immuabilité de la classe bourgeoise rendue oligarchie extrêmement restreinte appelée à posséder tout et tous par la loi de l’économie virtuelle. Si « le mythe, disait Mircea Eliade, n’est pas l’histoire réelle mais vraie des peuples », dans le cas d’une institution idéologique qui englobe toutes les structures sociales et étatiques, cette définition du mythe ne tient guère. Alors, pour nous autres qui questionnons un système devenu seconde nature de la réalité quotidienne des hommes, imposée par l’État ploutocratique, force est de remarquer que le mythe n’est autre que prétexte de justification, argutie de manipulation que tissent comme une pré-idéologie, les tenants de l’institution sociale qui argüe de vérité en se targuant de droit divin sans vraiment le dire. Car tout le discours social et le jugement, cette finalité idéelle du discours, y tient et en découle. Là, le logos censé rationnel à l’inverse du « mythos » relevant de l’imaginaire rêveur, dérive de ce dernier et n’est plus que multiplicité rythmique d’une même rengaine vouée à créer l’illusion d’une polyphonie moqueuse. Un sordide mode de variations ironiques de pluralisme sociétal factice et trompeur. La modalité même du foin discursif capitaliste est séquestration de l’État et abêtissement de la nation rendue prétexte parce que avortée sans cesse dans l’élimination de la citoyenneté effective pour l’opulence de quelques-uns. Le mythe capitaliste ne demeure que par la force et la monopolisation de toutes les ressources communes à l’humanité par quelques prédateurs qui, ainsi, gardent sous leur coupe, retiennent par le ventre, la grande majorité qu’ils réduisent à être de simples travailleurs esclaves de leur ordre pour la subsistance. La récusation de l’ordre capitaliste mondial n’est pas une adoption automatique du marxisme combien pluriel dans les courants qui s’en réclament, mais une exigence de la dignité fonctionnelle de l’homme dans la société. Pas de dignité sans l’équité économico-sociale et l’espace de liberté globale qu’elle suppose. Liberté ! flamme si fascinante, si intuitive à la nature humaine que tous les désaliénés des générations vont s’y brûler malgré le fer et le feu des tyrans !

Fascisme subtil du capitalisme contemporain… 

De fait, le fascisme est la fausse sensibilité de classe que suggère le pouvoir capitaliste à des strates des dites classes moyennes afin de mieux les porter à la haine raciale, ethnique et groupusculaire pour les dévier de la question systémique essentielle du dysfonctionnement tout court ou du fonctionnement arbitraire et despotique du capitalisme. C’est l’art du bourgeois de se maintenir au pouvoir en générant des imbécillités d’extrême droite voire de gauchisme populiste chez des frustrés désorientés. 

Le fascisme, « cette idéologie de l’homme moyen frustré » selon Wilhelm Reich, surgit à notre regard, comme avant tout, conséquence du complexe du bouc émissaire porté au délire nationaliste et érigé en idéologie d’État. Dans les états nantis fragilisés et endettés par le financiarisme qui frappe essentiellement le plus grand nombre constitué des classes moyennes décadentes d’aujourd’hui, le fascisme prend des formes de protection du national à travers des politiques de haine et d’ostracisme fignolées subrepticement par des establishments qui vont pourtant piller le monde via des multinationales et organismes financiers internationaux. L’on sait déjà que le fascisme, de par son amalgame idéel, est un protée dans ses procédés politiques où il se permet d’être tout comme en jeu de rôle pour défendre ses principes inhumains, antidémocratiques et discriminatoires de tendance plus ou moins essentialiste, populiste, raciste et xénophobe. Aujourd’hui, le capitalisme par l’empan étouffant de la finance, s’arroge le droit d’être de tous les partis, tous soumis par allégeance sourde aux tenants des institutions financières et du crédit. Une omnicratie financière qui consacre l’ubiquité planétaire de l’économie oppressive des grands consortiums bancaires privés.


Vivant de crises successives, le capitalisme contemporain bascule dans la xénophobie officielle des états et la haine des groupes considérés non productifs, haine que des secteurs bourgeois entretiennent chez les couches défavorisées des classes moyennes et les masses contre lesdits groupes coupables... La seule vertu dans cette société étant de générer des profits aux dieux maudits du crédit et du commerce, gare donc à qui ose refuser la prostitution généralisée. L’homme est rendu l’objet premier par la production et ultime par la consommation de l’infamie collective qui fait de l’économie malsaine du système, le commencement et l’aboutissement de l’existence des esclaves modernes inavoués. Ainsi pleins et hantés des misérables rudiments de cette idéologie, les humains se partagent les saletés comme des colifichets sacrés et veillent répressivement que leur prochains en soient imbus ! Car dans la horde infernale des esclaves décorés ou en haillons, épris de l’ordre qu’ils idolâtrent, il n’y a pas de place pour la différence qui refuse de consommer pour consommer. Une telle altérité contestataire est marginalisée soupçonnée soit de folie soit de crime contre l’ordre nécessairement moral, sain et transcendant inscrit dans la mécanique cosmique... Car en fait, le crime, dans sa factualité, peut se définir comme toute désobéissance constituant de la lèse-autorité. Et quelle pire lèse-autorité, que la non insertion coupable de l’individu ou du groupe dans l’ordre social accepté du grand nombre ! L’autre non insertion et lèse-autorité par inaptitude, elle, c’est de la pathologie mentale ! Toutes deux seront impitoyablement proscrites par les geôliers et bourreaux d’asile que sont nos bons citoyens mollement complices de leurs profiteurs dans nos sociétés policières et fascistes sans en avoir l’air.

Il n’y a pas de justice quand la justice sociale est bafouée par les lois et le droit dans un système juridico-légal voué à garantir et pérenniser par toutes sortes d’artifices, les privilèges des oligarques autoproclamés maîtres de tous biens et ressources planétaires, ce qui les fait également maîtres des vies et du temps des hommes.



La chute du capitalisme, malgré ses ostentations et triomphalismes médiatisés, est prévisible à moyen et à long terme vu que même le mythe de la propriété se dément dans la fragilité du statut de propriétaire à l’échelle des classes dominées vite dépossédées à la moindre crise façonnée par des banquiers pour se faire renflouer ou grossir leurs caisses par les politiciens. Toutefois, tout est à créer pour mettre en place un ordre plus juste car les révolutions rouges et tyranniques du passé avec leur nomenklatura, leur goulag et gabegie de gestion, elles non plus ne tiennent la route dans l’itinéraire des vrais amis de la liberté militant pour la vraie libération sociale des peuples.



Le mythe est souvent d’essence religieuse sinon de portée sacrée, alors que la fable et le conte relèvent de l’imaginaire laïc et profane qui se contente de décrire les tempéraments et les mœurs avec un dessein moralisateur. Quand vient l’immoralisme économique des oligarchies et que sévit la chute du mythe fondateur de leur système, les fables s’imposent alors en oracle pseudo-scientifique par les spécialistes soudoyés et la propagande éhontée de la presse. Une suprême ironie des intelligences et un dédain extrême du droit des peuples à comprendre et savoir ce qui les regarde dans leur vie quotidienne !

Nous disons que si le sens suprême, l’ontologique, le divin, le transcendant, reste à l’échelle de la conscience spirituelle des individus pour la félicité ou la perdition, le sens social consiste à démythifier le vol autorisé qu’est le capitalisme. Le sens et son appropriation demeure donc le combat du sens terrestre contre l’absurde dans ce qui est chose humano-sociale et non transcendance cosmique inatteignable.



En attendant, les maîtres de l’économie capitaliste bricolent une société d’ersatz où le substitut, le postiche, par la surenchère de la ruse médiatique et autre, s’impose comme réalité dans la lourdeur et la démesure du mensonge systémique au cœur d’une population décivilisée qui s’offre le luxe de vivre des bobards officiels et se permet volontiers de se passer de la vérité.

« Le capitalisme n’est ni une institution ni une personne (…) mais une logique » déclare Michel Beaud, nous, nous disons qu’il est une méga-institution plurale qui englobe toutes les institutions et méta-institutions de rection et de "correction" humaine, et prédétermine ainsi jusqu’aux réflexes sociaux des individus.



Démythifié, le capitalisme actuel n’en garde pas moins ses airs de mystère, non démystifié qu’il est grâce à l’essentialisme de classe qu’il ancre dans le crâne des individus.



La démystification et le démantèlement des statuts de classe, constituent le seul horizon possible de libération des hommes pour l’avènement d’une société sans classes, non d’égalité ontologique - car les hommes s’ils sont identiques en attributs, ne sont même pas naturellement égaux par leurs facultés - mais d’égalité effective des chances et donc d’équité véritable et de mérite, où la justice sociale n’est pas qu’un mot, où l’exploitation sera abolie grâce à la disparition des classes et la dignité du moins doué des humains, du plus petit d’entre ses semblables, respectée parce qu’au cœur des préoccupations et des politiques adoptées et menées au nom de l’humanité de tous.



27 novembre 2014

"L'Appel aux vivants" (1980) vu par le quotidien régional "La Montagne"



Roger Garaudy fut un temps candidat aux Présidentielles de 1981.
Les difficultés rencontrées ne permirent pas le maintien jusqu'au bout de cette candidature et Roger Garaudy apporta finalement un soutien motivé à François Mitterrand
L'article ci-dessus est tiré du quotidien "La Montagne", Clermont-Ferrand, 21 février 1980, Chronique "Ici Paris"

26 novembre 2014

Le catalogue "Garaudy" à la BNF



·  Les mythes fondateurs de la politique israélienne (1996) .Essai d'histoire contemporaine paru l'année précédente dans "La vieille taupe". 277 p. 1996 [Chennevières-sur-Marne] R. Garaudy-Samiszdat
·  Dieu est mort. Etude sur Hegel 1970 Paris Presses universitaires de France
·  10e Congrès national du Parti communiste français, 26-30 juin 1945. Les Intellectuels et la renaissance française. Édition : (1946). Paris, Éditions du Parti communiste français (Impr. centrale du Croissant). Auteur du texte : Georges Cogniot (1901-1978), Roger Garaudy (1913-2012)
·  60 oeuvres qui annoncèrent le futur. 7 siècles de peinture occidentale.  1974 Genève. - [Paris] A. Skira. - diffusion Flammarion
·  A contre-nuit. Poème. 246 p. Édition : 1987 Lausanne Ed. de l'Aire
·  L'Affaire Israël. 201 p. La couv. porte en plus : "le sionisme politique". 1983 Alger. - Paris ENAP. - SPAG-Papyrus

25 novembre 2014

Un nouvel internationalisme prolétarien. Point de vue, dans "l'Humanité"




L'Humanité n'a pas traité équitablement (c'est mon point de vue !) Roger Garaudy ni en 1970 avant son exclusion du PCF ni lors de son procès en 1998. Malgré cela, la publication de l'article ci-dessus est pour moi l'occasion d'attirer votre attention sur les dangers qui pèsent sur l'existence de ce journal qui compose historiquement, politiquement, culturellement, une partie du paysage de la presse et de la démocratie françaises et donc sur la déformation, le manque, que subiraient ce paysage déjà si pollué et cette démocratie déjà bien altérée si "l'Huma" venait à disparaître: http://www.humanite.fr/une-souscription-pour-faire-face-nos-besoins-financiers-558345

24 novembre 2014

Biografia de Roger Garaudy

Roger Garaudy (1913/07/17 - 2012/06/13)

Escritor, político y filósofo francés

Nació el 17 de julio de 1913 en Marsella.

Cuando cuenta veinte años ingresa al Partido Comunista y estudia Filosofía en Estrasburgo, siendo designado luego profesor en la ciudad de Albi.

Contrae matrimonio y seis meses más tarde estalla la II Guerra Mundial. Es movilizado en un regimiento de Tolosa y combate en la región de Somme. Lucha valerosamente durante la fulgurante ofensiva germana, obteniendo la Cruz de Guerra. Fue deportado en septiembre de 1940 a un campo de concentración en el desierto de Sahara, junto a decenas de dirigentes y sindicalistas. Liberado en junio de 1943, tras la derrota de las tropas del Eje en África, empieza a trabajar como periodista en Radio Francia de Argel.

Se traslada a París y es elegido diputado en las Asambleas Constituyentes de 1945 y 1946, siendo designado vicepresidente. En 1970 es expulsado del Partido Comunista Francés por sus declaraciones contrarias a la intervención soviética en Checoslovaquia.

Durante mucho tiempo figura emblemática de la izquierda francesa, en 1982 aceptó el Islam y cambió su nombre por el de Ragaa. Autor de varios libros de pensamiento islámico, entre los que se cuentan L'islam habite nôtre avenir, Promesas del Islam, Córdoba capital del pensamiento unitario, Hacia una guerra religiosa, Les États-Unis avant-garde de la decadence o Los mitos fundadores de la política israelí.

Enemigo político de los Estados Unidos e Israel, consideró "un mito" el "exterminio de seis millones de judíos" y negó la pertinencia de emplear el término genocidio porque, afirma, "prefiero hablar de una masacre atroz que de genocidio".

El presidente Mohamed Jatamí le recibió en su residencia oficial en Teherán, durante la feria internacional del libro de El Cairo de 1998. Fue condenado a seis meses de cárcel con suspensión de pena y una multa de 150.000 francos por la llamada ley Gayssot, que castiga la "incitación al odio racial" o la "negación de crímenes contra la humanidad".

En septiembre de 2001 sufrió un derrame cerebral. El 13 de junio de 2012, a los 99 años, falleció en su casa en las afueras de París.

Obras seleccionadas:
Le communisme et la renaissance de la culture française (1945)
Les sources françaises du socialisme scientifique (1948)
Le manifieste du parti communiste: révolution dans l’histoire de la pensée socialiste (1952)
Théorie matérialiste de la connaissance (1953)
Mesaventures de l’anti- marxisme. Les malheurs de M. Ponty (1956)
Humanisme marxiste (1957)
Questions à Jean-Paul Sartre, précédées d’une lettre ouverte (1960)
Dieu est mort (1962)
Qu’est-ce que la morale marxiste? (1963)
Karl Marx (1965)
Marxisme du s. XX (1966)
Le Problème chinois (1967)
Lénine, PUF, Paris (1968)
Pour un réalisme du XXe siècle. Etude sur Fernand Léger (1968)
Pour un modèle Français du Socialisme (1968)
Le Grand tournant du socialisme(1969)
Toute la vérité (1970)
Reconquête de l'espoir (1971)
L’Alternative(1972)
Parole d'homme (1975)
Pour un dialogue des civilisations Denoël (1977)
Appel aux vivants (1979)
L’Affaire Israël (1980)
Appel aux vivants (1980)
Promesse d'Islam (1981)
Pour l'avènement de la femme(1981)
Mon tour du siècle en solitaire (1989)
Intégrismes (1990)
Les Orateurs de la Révolution française (1991)
À Contre - Nuit (1992)
L'Islam et l'intégrisme (1996)
Les Mythes fondateurs de la politique israélienne(1996)
Grandeur et décadences de l'Islam (1996)
L'Islam en Occident, Cordoue capitale de l'esprit(2000)
Le Terrorisme occidental (2004)


23 novembre 2014

L'ami Pierre

"L'espérance, c'est croire que la vie a un sens"





Henri Grouès, dit l’Abbé Pierre, (né le 5 août, 1912 à Lyon, France) est un prêtre français, fondateur en 1949 d’Emmaüs, une organisation pour les pauvres et les réfugiés.
Enfant d’une riche famille aisée et pieuse de soyeux lyonnais, son père, homme de bonté, visait les plus démunis, emmenant parfois ses enfants, au nombre de sept, dont il est le troisième. À 12 ans, il accompagne son père à la confrérie séculaire des Hospitaliers Veilleurs, où les bourgeois se font coiffeurs barbiers pour les pauvres.
À 16 ans, il veut se faire franciscain, cependant il devra attendre 17 ans et demi. À ce sujet il déclara « On me disait beau gosse, peut-être même un peu mondain, pourtant, le lendemain je serai moine ».
En 1931, il renonce à tout héritage et entre chez les capucins. En religion, Henri Grouès devient frère Philippe. En 1932, il entre au cloître au couvent de Crest. Il est ordonné prêtre en 1938. En avril 1939, il devient vicaire à Grenoble.
Vient la Seconde Guerre mondiale, où il est mobilisé comme sous-officier dans le train des équipages, en décembre 1939.
En juillet 1942, deux juifs pourchassés lui demandent de l’aide. Il découvre alors les persécutions et s’engage immédiatement, apprend à faire les faux papiers. Dès août, il commence à faire passer des juifs en Suisse.
Il participe à la création de maquis dans le Vercors et la Chartreuse.
Il aide les réfractaires au Service du travail obligatoire (STO). Il prend le nom d’Abbé Pierre dans la clandestinité. En 1944, il passe en Espagne, puis rejoint Charles de Gaulle à Alger.
Il devient une haute figure de la Résistance.
Après la guerre, il est député de Meurthe-et-Moselle aux deux Assemblées nationales constituantes (1945-1946), comme indépendant apparenté au Mouvement républicain populaire (MRP), puis à l’Assemblée nationale de 1946 à 1951, où il siège au groupe MRP.
En 1947, il est vice-président de la Confédération mondiale, mouvement fédéraliste universel. Avec Albert Camus et André Gide, il fonde le comité de soutien à Garry Davis, citoyen du monde.
Il fonde en 1949 l’association Emmaüs (du nom d’un des épisodes des évangiles) d’aide aux déshérités, particulièrement aux sans-abris. Il commence ainsi, dés 1950 par la communauté d’Emmaüs Neuilly-Plaisance.
Les communautés Emmaüs se financent par la vente de matériels et d’objets de récupération et construisent des logements. C’est une organisation laïque. Le parlementaire quitte l’enceinte du Palais-Bourbon, le soir venu pour aller rejoindre les gueux, les miséreux. 
Grand sportif, il n’hésitera pas à faire des plongeons spectaculaires pour attirer l’attention du public et des médias.
En 1952, il participera au jeu « Quitte ou double » pour alimenter financièrement son combat, où il gagnera 254 000 francs.
L’abbé Pierre acquiert sa notoriété à partir du très froid hiver de 1954, meurtrier pour les sans-abris pour une «insurrection de la bonté». «Il y a 50 ans, tous sortaient à peine des atrocités de la guerre. Tous avaient dû fuir, chacun se sentait proche des réfugiés. Les gens se rappelaient la souffrance et la peur. Ils étaient davantage prêts à réagir. Mais on ne renouvelle pas des faits historiques comme celui-là.»
Le jeune prêtre lançait le 1er février 1954 un appel sur les antennes de Radio-Luxembourg (RTL) : « Mes amis, au secours… Une femme vient de mourir gelée cette nuit à 3 heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l’avait expulsée. Devant leurs frères mourant de misère, une seule opinion doit exister entre les hommes : la volonté de rendre impossible que cela dure. Je vous en prie, aimons-nous assez tout de suite pour faire cela. Que tant de douleur nous ait rendu cette chose merveilleuse : l’âme commune de la France, merci ! Chacun de nous peut venir en aide aux sans-abri. Il nous faut pour ce soir, et au plus tard pour demain : 500 000 couvertures, 300 grandes tentes américaines, 200 pöêles catalytiques. Grâce à vous, aucun homme, aucun gosse, ne couchera ce soir sur l’asphalte ou les quais de Paris. Merci ». Le lendemain, la presse titra sur « l’insurrection de la bonté ». L’appel rapportera 500 millions de francs en dons. 
En 2005, dans son livre Mon Dieu… pourquoi ?, rédigé avec Frédéric Lenoir, il déclare qu’il a eu des relations sexuelles alors qu’il était tenu par son serment d’abstinence. Aucune de ses relations n’a duré, car il était tiraillé entre son désir et son vœu de célibat. À ce sujet, il se prononce pour une réforme de la politique de l’Église en faveur du mariage des prêtres. Et ne comprend pas l’interdiction de Jean-Paul II et de Benoît XVI, car ils autorisent le mariage des prêtres dans les pays orientaux. De plus, il voit dans cette autorisation un moyen de lutter contre la pénurie de nouveaux membres de l’Église.
Il se prononce également pour l’ordination des femmes et ne s’oppose pas à l’homoparentalité, à condition que les enfants ne subissent aucun préjudice psychologique ou social et explique notamment son opinion sur le fait « qu’un modèle parental classique n’est pas nécessairement gage de bonheur et d’équilibre pour l’enfant ». Mais il se déclare contre le mariage et préfère y substituer une « alliance » homosexuelle. Car selon lui, le mariage homosexuel « créerait un traumatisme et une déstabilisation sociale forte ». 
L’image du grand barbu en soutane, en grosse pèlerine et godillots forge vite son statut de « héros légendaire », de « juste ». Il a une très grande popularité en France, les enquêtes d’opinion qui la mesurent le placent souvent en tête, notamment celle annuelle du Journal du Dimanche. Il a demandé à être retiré de la liste des nominés. « C’est à la fois une arme et une croix », avoue-t-il.
Encore dans les dernières années de sa vie, malgré la maladie et l’âge, il est descendu dans la rue pour soutenir la cause des pauvres. Il a donné sa crédibilité et soutenu l’association Droit au Logement (DAL), qui dans les années 1990, ne cesse de bousculer les autorités en place, quelle que soit leur couleur politique, en réquisitionnant des logements laissés vides par leur propriétaire.
Convoqué à Boulogne au siège de la LICRA en 1998, il a préféré en perdre le titre de président d’Honneur pour rester l’ami de l’auteur controversé Roger Garaudy sans pour autant approuver toutes les prises de position de celui-ci.
Le 1er février 2004, 50 ans après son premier appel, l’Abbé Pierre a lancé un nouvel appel à la solidarité, depuis l’esplanade du Trocadéro à Paris, devant 6 000 personnes pour pallier l’incurie.
Il nous quitte lundi 22 janvier 2007 à 5h25 à l’hopital Val-de-Grace (Paris) à l’âge de 94 ans des suites d’une infection pulmonaire déclarée dimanche 14 janvier 2007.


http://lavoiedelasagesse.wordpress.com/labbe-pierre-1912-2007/

18 novembre 2014

Apport du bouddhisme à une théorie et à une pratique de libération



Contribution bouddhiste au concept de libération
Vén. Dr. Wilegola Ariyadeva1

La genèse et l'histoire du bouddhisme sont nécessaires pour éclairer la contribution
que ce dernier peut apporter à une théorie de la libération. Le Bouddha se réfère
aux sociétés pré-classistes pour critiquer la société de castes imposée par le
brahmanisme. Pour lui, les injustices sociales sont le résultat d'une série de causes
dépendantes : la pauvreté provient de causes économiques et engendre le vol et la
violence. La base de tous les désordres est le désir de la possession. Il y atoujours
une influence mutuelle entre la conscience et les désordres sociaux. Quant à
l'origine de l'État, elle se trouve dans un contrat social entre le peuple et son
dirigeant, le roi devant être le serviteur de la communauté. Celui-ci peut être démis
s'il ne respecte pas le contrat. C'esUadhamma (loi universelle) qui doit être à la
base de l'ordre social et elle s'exprime dans les 5 principes (pancasild). Sans son
respect le bonheur ne peut être atteint. La non-violence n'est pas radicale dans le
bouddhisme, même si ce dernier la privilégie comme méthode d'action. Le
renversement d'un régime autocrate par le peuple peut entraîner une violence,
envisagée comme un moindre mal. Enfin, la conception bouddhiste de l'économie
envisage cette dernière comme destinée à satisfaire les besoins humains, sans
laisser le désir de possession et l'appât du gain dominer sa logique.

Pour comprendre l'apport du bouddhisme à une théorie et à une
pratique de libération, il faut replacer sa genèse dans l'histoire. Le
Bouddha est né dans une société clanique, dominée par le brahmanisme
et qui avait été hiérarchisée en castes, au départ divers clans. Son
origine était le clan Sakya, qui à l'origine était une société sans classes.
Dans le système des castes, ce clan avait été intégré dans la caste des
kastryas, exerçant, entre autres, les fonctions politiques. Le Boudhha se
référa souvent dans son enseignement aux sociétés claniques,
notamment à leur caractère non-hiérarchique et démocratique. Ce fut
le cas lors de la constitution de la s a n g h a (communauté monastique).
Debiprasad Chattopadhyaya affirme que le bouddhisme fut à ce point
influencé par les sociétés pré-classistes, qu'au moins dans sa phase
initiale, il fut à la fois dans son organisation et dans son idéologie,

1. De nationalité sri-lankaise, Dr. en philosophie et professeur de pali et d'études
bouddhistes à l'Université de Ruhuna (Sri Lanka).

remarquablement éloigné des caractéristiques d'une société de classes
[Debiprasad Chattopadhyaya, 1985, 15].
Les concepts fondamentaux du brahmanisme relatifs à
l'organisation de la société furent radicalement transformés par le
Bouddha. Selon W.S. Karunaratne, le Bouddha condamna l'ordre
social et politique brahmanique, comme injuste, inéquitable et
corrompu. Dans l'ordre social indien, les brahmanes avaient attribué
au Dieu créateur Brahma, l'origine des distinctions entre les diverses
classes et castes de la société. ..Ils se proclamaient supérieurs en savoir
dans toutes les questions intellectuelles et religieuses... Le Bouddha
s'inscrivit en faux contre ce type de société qui se condamnait elle-même
au déclin et à la dégradation. Son renoncement à fonder une
famille et l'adoption d'un rôle de réformateur, symbolisent de manière
éloquente sa révolte contre l'irrationalité et la cruauté de la vie
sociale [W.S. Karunaratne, 1993, 49]. Plusieurs sutras ou suttas
(passage des écritures, que nous citerons selon les canons établis dans
les textes en langue pali), indiquent le rejet par le Bouddha de l'ordre
social existant et son désir d'annoncer par sa prédication, la naissance
et l'essor d'une nouvelle société.

I. L'analyse bouddhiste des injustices sociales
La philosophie sociale du bouddhisme est basée sur le concept du
paticcasamuppada (l'origine dépendante) ou causalité. Les structures
sociales et politiques de la société conditionnent les comportements
sociaux des gens. Le Bouddha explique comment les désordres sociaux
naissent dans les sociétés humaines. La pauvreté s'est accrue, suite au
manque de production de biens économiques parmi les pauvres.
L'augmentation de la pauvreté provoqua l'accroissement des vols et
des pillages. Ces derniers débouchèrent sur la multiplication des
armes, qui à leur tour firent couler le sang et furent à l'origine des
tueries et des massacres. C'est ainsi que le Bouddha indique la longue
chaîne de causalités qui est à l'origine de la misère et des conflits dans
la vie sociale [D.III.58 ffj. Dans bien des sutras, le Bouddha explique
aussi comment les structures politico-économiques (samvidhanam)
doivent être organisées pour satisfaire aux besoins de la société.
Le Bouddha souligne l'interdépendance entre l'esprit et la matière.
Il affirme que les structures politiques et sociales exercent des effets sur
la conscience individuelle et sociale et que cette dernière influence à
Contribution bouddhiste au concept de libération 217
son tour les crises sociales. Dans la sutta Mahamdana, le Bouddha
explique au vénérable (moine) Ananda, l'origine des désordres et des
injustices sociales, selon la théorie de l'origine dépendante. Ainsi,
Ananda, le désir prend naissance dans la sensation et la poursuite de
l'objet provient du désir. Elle même débouche sur l'appât du gain et
ce dernier provoque la décision d'agir, qui à son tour engendre le
désir et la passion. Désir et passion sont à l'origine de l'obstination et
celle-ci conduit à la volonté de possession, qui est la source de
l'avarice et de nombreux autres maux, tels que coups et blessures,
conflits, oppositions et vengeances, querelles, disputes et mensonges
[D.III.58 ff).
Le Bouddha expliqua ensuite que les bâtons, les armes, les
querelles, les oppositions, les disputes, les altercations, les rumeurs, les
mensonges et d'autres maux ont pour seule origine, seule genèse, seule
base et seul support, la défense de la propriété. Dans cette s u t t a , le
Bouddha explique clairement les méfaits de l'instinct d'acquérir. Selon
cette pensée, lepaticcasamupadda (le désir de possession, de propriété)
est à la base, non seulement de la souffrance spirituelle, mais aussi des
déséquilibres sociaux. Le bouddhisme enseigne aussi que les conditions
spirituelles et sociales s'influencent mutuellement.

II. La théorie bouddhiste de l'origine de l'État
Le concept bouddhiste de l'État repose sur la théorie du contrat
social. La sutta Agganna explique la genèse et la croissance de l'État.
L'évolution de la société provient du fait que le rapport entre l'État, son
chef responsable et le peuple sont de nature contractuelle. Bany Prasad
rappelle que dans le bouddhisme, il n'y a rien de divin dans la
constitution de l'État et que ce sont la raison et les convenances qui
déterminent la fonction de l'État [B. Prasad, 1927, 141].
Selon le brahmanisme, l'origine et la structure de la société sont
d'origine divine et le roi n'avait de pouvoir que dans la mesure où il
se soumettait au dharma, c 'est à dire la loi (celle des castes), qui était
elle-même une émanation de Brahma. D'où la théorie du pouvoir divin
des rois [O.H. Vijesekara, 1960, 3]. Dans ce domaine, le bouddhisme
non seulement prenait ses distances vis à vis de la théorie de l'origine
divine du pouvoir, mais il rejetait aussi le fatalisme
(pubbekatahetuvada) impliqué dans l'idée que le pouvoir et l'État sont
le fruit du hasard, sans aucun lien avec des causes préalables
{ahetuappaccavadd).
Dans la sutta Agganna , le Bouddha explique l'origine de l'État par
le rôle de l'économie. Ainsi le moine K. Ariyaseka Thero, décline les
deux facteurs qui ont donné naissance à la parenté : d'une part, la
pensée humaine ou ce que nous appellerions aujourd'hui la psychologie
et de l'autre, les moyens de subsistance ou l'économie. Il indique
ensuite quelles furent les étapes de l'évolution de la société humaine et
comment les êtres humains sont passés du stage de collecte des
aliments à celui de leur production par l'agriculture. Ils s'organisèrent
alors en familles et délimitèrent leurs champs de culture respectifs, ces
derniers ayant été auparavant des propriétés collectives. C'est ainsi que
naquirent la propriété privée et la famille, donnant naissance à une
tendance à accumuler individuellement (sammidhikaraka) des produits
agricoles. Un pas de plus fut franchit, lorsque qu'une personne, en plus
de sa part individuelle, s'empara de celle d'une autre. À partir de ce
moment, le vol, les accusations, les mensonges, le recours à la force,
devinrent monnaie courante dans les relations sociales [K. Ariyaseka
Thero, 1987, 102].
Cette explication de l'origine de l'État, montre que la théorie du
contrat social s'appuie sur l'éthique ou sur la vertu et le consentement
moral des membres de la société. Selon le bouddhisme, la société
primitive était gouvernée par l'éthique et la vertu. Chaque personne
participait à la solution des problèmes. Dans les assemblées, il n'y avait
ni supérieur, ni chef suprême. Chacun jouissait du droit à la vie et
comme ces sociétés dépendaient des ressources naturelles, chacun avait
de quoi manger. Il n'y avait ni compétition, ni différence de statut
social.
Tant que les êtres humains vivaient une vie naturelle et
consommaient les produits de la nature, considérée comme propriété
commune, ils étaient heureux et leur vie commune était régie par la
moralité et la vertu. Mais, avec le temps, lorsqu'ils furent dominés par
la passion et le désir, les problèmes économiques et sociaux apparurent.
Bref, désir et passion conduisent à la crise économique et sociale. La
sutta Agganna explique comment les désirs engendrèrent les problèmes
sociaux. C'est un des facteurs qui conduisit à la naissance de l'État. La
disposition au désir encourage les êtres humains à posséder et à
accroître la propriété privée au-delà de ce qui est nécessaire pour
gagner sa vie. Dans la sutta Mahadinana [D.II.59], le Bouddha
Contribution bouddhiste au concept de libération 219
explique l'origine de l'État, fruit des déséquilibres sociaux, de la façon
suivante.
L'État est né de l'opinion unanime de l'ensemble du peuple [sutta
Agganna] pour assurer l'application de la dhamma (loi universelle). Le
roi est appelé «le grand élu», parce qu'il est élu par tout le peuple
(mahajanena samatto Mahasamotto). La souveraineté du peuple est
déléguée à l'élu. Le roi utilise cette souveraineté au nom du peuple,
sous l'égide de la dhamma (loi). C'est pour cela que Wilegola
Ariyadeva écrit dans la Catusataka (chronique), que le roi était le
serviteur de la communauté (gana-dasd) [H.P. Sastri, 1914, 68].

III. Le pouvoir politique
Selon le bouddhisme, l'État a été créé par le peuple pour le peuple.
Le pouvoir de ce dernier a été transféré vers une personne capable de
maintenir la loi et l'ordre. A.L. Basham écrit à ce propos : Le «grand
élu» a été choisi par une grande assemblée du peuple à partir du
moment où la propriété privée et la famille n'étaient plus respectées.
Il fut élu pour assurer la loi et l'ordre et dépendait pour sa subsistance
d'une part des récoltes et des troupeaux, en retour de ses services
[A.L. Basham, 1956,16].
S.R. Goyal fait remarquer que : Dans la théorie bouddhiste, le rôle
du roi est confiné au maintien de l'ordre public pour le peuple qu i lui
a confié cette tâche..., ce qui justifie l'office royal au service de la
propriété et de la sécurité publique. De plus, cela renforce l'idée que
l'origine de la royauté est le résultat d'un contrat bilatéral qui
imposait au détenteur du pouvoir de punir les contrevenants, en retour
du paiement d'un tribut [S.R. Goyal, 1987, 303].
K.N. Jayatilleke affirme que, selon la théorie du contrat social, la
souveraineté, dans le sens du pouvoir législatif suprême, appartient à
l'ensemble du peuple [K.N. Jayatilleke, s.d.83]. Il faut cependant être
prudent dans l'interprétation de ce concept. V.P. Varma remarque, en
effet, que la théorie du «grand élu», ne peut être considérée comme la
formulation pure et simple de la théorie consuelle de l'autorité
politique. Cependant, on peut affirmer qu'elle y est incohativement
présente [V.P. Varma, 1978, 195].
Selon le bouddhisme, quand le roi faillit à sa tâche et ne remplit pas
le contrat, le peuple a le droit de le remplacer. Wessatara Jataka
rappelle que lorsque le peuple demanda au roi de bannir son fils du
royaume, à cause de sa félonie, celui-ci agréa et déclara «que la
volonté du peuple s'accomplisse» [JK. VI., 490]. La sutta Cakkavatti
Sinhanada suggère, pour sa part, que l'autorité politique ne se transmet
pas par héritage, ce qui indique que l'autorité politique est fondée sur
le peuple et sur la loi universelle. Le royaume dépend de la conduite du
roi. Une dictature arbitraire n'est pas admissible dans le cadre d'une
philosophie bouddhiste.

IV. La dhamma comme loi universelle de Tordre social
Dans la philosophie politique bouddhiste, le concept de dhamma est
un des plus importants. Il signifie la loi universelle. La sangha
(communauté monastique) est régie sans aucun leadership suprême par
la dhamma. Le Bouddha refusa de désigner un successeur, quand il
renonça à se reconnaître les prérogatives d'un leader. Dans la sangha,
le Bouddha représente la dhamma. «Celui qui voit la dhamma me voit
et celui qui me voit, voit la dhamma» [S.III., 120]. Cela signifie que le
Bouddha s'assimile à la dhamma.
Dans la sutta Agganna, le concept de dhamma se réfère à la théorie
sociale et politique. Il s'agit de l'application de l'éthique universelle à
l'administration de l'État, alors que le concept brahmanique de dharma
se référait à l'ordre social construit sur les quatre castes fondamentales
(yarnasrama dhamma). Le respect de cet ordre établi par la volonté
divine débouche sur la crainte de le violer et d'encourir les sanctions
qui s'en suivent. Les réincarnations successives obéissent à cet ordre,
plaçant les brahmanes au sommet d'une pyramide' sociale et
ontologique.
Au contraire, dans le bouddhisme, le dhamma s'exprime dans le
Pancasila (les cinq principes): s'abstenir de tuer des êtres vivants, de
voler, de mentir, de se méconduire dans les plaisirs, et de s'adonner à
la boisson. Dans une société où ces préceptes ne sont pas respectés,
selon L.M. Joshi, une vie paisible n'est pas possible. Il n'y a pas de
paix et sans paix, le bonheur ne peut être atteint. En l'absence de
bonté, de paix et de bonheur, les chances de réalisation du nirvana,
sont nulles [L.M. Joshi, 1972, 64]. Voilà pourquoi la libération
personnelle, comme la libération sociale, ont pour base le Pancasila.
Le bouddhisme qui unit l'attitude personnelle avec le comportement
social, a donc accompli une transformation révolutionnaire du concept
de dhamma dans la philosophie politique. Cela a influencé les
politiques de plusieurs sociétés à travers le monde, dans le passé et dans
le présent.
Il faut aussi rappeler que le bouddhisme attache une grande
importance à la discipline morale et mentale. Ceux qui dirigent la
société (les politiciens), doivent lutter contre le désir (lobha) et
l'illusion {moha) et travailler pour la société, non en fonction de gains
matériels, d'intérêts égoïstes ou par soif du pouvoir ou le désir de
réputation, mais en se consacrant à la libération sociale, par
compassion sincère et par amour pour les gens. C'est pour cela que
certains ont dit que le bouddhisme est une philosophie sociale éthicoreligieuse
et qu'en tant que telle, elle doit s'harmoniseravec un système de
 gouvernement [D.C. Vijayawardhana, 1953, 554].

V. La non-violence
Dans le bouddhisme, la non-violence n'est pas poussée à un degré
d'impraticabilité, comme dans le jaïnisme. Le Jataka Pali affirme que
lorsque le roi ne remplit pas le contrat social, opprime le peuple et suit
la voie de la tyrannie, alors le peuple a le droit de le renverser. K.N.
Jayatilleke écrit à ce propos, que le seul endroit dans les textes
bouddhistes où la violence semble envisagée comme un mal nécessaire,
c'est pour le renversement d'un régime corrompu. Cependant, il ne fait
pas de doute que la résistance non-violente ne soit considérée comme
supérieure à l'usage de la violence, même pour renverser un
gouvernement tyrannique [K.N. Jayatilleke, 1975, 83-84]. Bien que le
bouddhisme favorise la non-violence, par respect pour les autres et pour
protéger la dhamma, il admet des situations limites. Le Bouddha lui-même
donna un exemple dans la sutta Abhayaraja Kumara : Quand un
enfant a un objet bloqué dans la gorge, demanda le Bouddha, que faut-il
faire? «Il faut l'enlever, répondit le prince, même  s'il faut verser du
sang». De la même manière, fut la réponse, le Bouddha affirme des
vérités dures à entendre, quand c'est nécessaire et utile [M.I., 391 ffj.
Il en est de même en matière sociale. Quand un groupe use
uniquement la force physique et ne peut être contrôlé, le bouddhisme
propose l'établissement d'une contre-force. Cela ne veut pas dire qu'il
prône la violence. Nandasena Ratnapala a fait remarquer que la
pratique bouddhiste est d'examiner ses propres motivations dans
l'exercice d'une action violente. Si elle doit être accomplie, un
minimum de dommages physiques doit être la règle. Ce ne peut être en
fonction de motifs égoïstes, mais dans le but de servir les autres et de
les préserver de conséquences encore pires [Nandasena Ratnapala,
1993,91].

VI. Le concept bouddhiste d'économie
Selon l'enseignement de la Paticcasamuppada, un des principaux
facteurs affectant le comportement des gens est la situation économique
de la société. Le terme pali attha (en sanscrit artha) peut être utilisé à
la fois dans un sens spirituel et matériel. Par ailleurs, la politique et
l'économie sont inséparables. C'est ce qu'en langage moderne on
pourrait appeler l'économie politique. S.J. Tambiah affirme que le
terme arthasastra, comme le Bouddha l'utilise, peut être traduit par la
gestion de l'économie politique [S.J. Tambiah, 1976, 28].
La philosophie de l'économie bouddhiste ne peut être séparée de
l'enseignement concernant la droiture de la vie (samma-ajiva). Ainsi,
au sixième siècle avant Jésus-Christ, le bouddhisme conseillait aux
laïcs d'éviter de s'engager dans les cinq professions suivantes :
commerce des armes, commerce des esclaves, commerce de la viande,
commerce des intoxiquants, commerce du poison [A.III, 208].
Selon le bouddhisme, les besoins humains peuvent être satisfaits et
il encourage chacun à le faire. Consommez autant que vous en avez
besoin [D.III.62,63]. Personne ne peut manger au-delà de la capacité
de son estomac. Personne ne peut porter un excès de vêtements.
Personne ne peut dormir dans plusieurs lits à la fois et personne ne peut
vivre en même temps dans plusieurs logements. Le bouddhisme
n'admet donc pas que les besoins humains soient illimités. Cependant,
pour lui, la pauvreté est une disgrâce dans la vie. La prospérité
économique est une condition nécessaire pour l'établissement de la
justice sociale et pour la vie vertueuse du peuple. Le bouddhisme
affirme aussi que la manière de gagner de l'argent doit être vertueuse.
L'exploitation du travail est considérée comme une injustice
(adkhammiko). Le Bouddha affirme que les biens doivent être acquis
par la force des bras et la sueur du front [A.III, 67; III, 45 f], donc par
un effort personnel.

Conclusion
L'idée du bouddhisme est que la libération doit atteindre
simultanément l'individu et la société [voir Nalin Swaris, 1999]. C'est
seulement à cette condition qu'une révolution peut être réelle.. Il est
certain que le Bouddha n'a pas été un révolutionnaire au sens
contemporain du mot, mais son insistance à affirmer qu'il ne peut y
avoir de castes ou de supériorité d'un être humain sur un autre, que
tous sont égaux, injectait un ferment révolutionnaire sans la société de
son temps. En rejetant tout privilège basé sur la naissance,
l'occupation, le statut social, il effaçait d'un trait toutes les barrières et
obstacles nés de normes arbitraires, y compris celles de l'impureté
traduites socialement. En créant la sangha, sur un modèle démocratique
et de partage d'une vie de simplicité, il établissait le symbole vivant de
valeurs à promouvoir dans la société. Voilà pourquoi les principes du
bouddhisme peuvent aujourd'hui inspirer la transformation des sociétés
contemporaines embarquées dans une course à une croissance censée
illimitée, dans une économie du profit (du désir) et non des besoins,
dans une inégalité sociale grandissante, dans la destruction de la nature
et l'exploitation du travail.

Traduction et adaptation de l'anglais : François Houtart

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CENTRE TRICONTINENTAL
Théologies de la libération
© L'Harmattan, 2000
ISBN : 2-7384-9435-8
Pages 215 à 224