30 septembre 2014

Pour un Islam de notre temps



Pour un Islam du XXème siècle
(Charte de Séville)

1) L'Islam du XXème siècle ne peut être que l'Islam éternel.
Car l'Islam n'est pas une religion parmi d'autres, mais la religion fondamentale et première
depuis que Dieu, comme il est dit dans le Coran « a insufflé en l'homme de Son Esprit »
(XV,29).Depuis Adam, jusqu'à nous.
Il n'y a pas d'Islam d'Occident, pas plus qu'il n'y a d'Islam d'Afrique Noire, d'Islam arabe,
d'Islam de l'Inde ou de l'Indonésie.
Il n'y a qu'un seul Islam.
Celui que le Coran appelle la « sunna de Dieu », la continuité des révélation prophétiques et
du dernier message, celui de Muhammad (pbsl).
Notre tâche première est de témoigner de notre foi islamique en la vivant dans son
universalité. Et non pas de défendre un folklore et des traditions particulières.

28 septembre 2014

Un siècle de sages

CULTURE ET CIVILISATION : Le siècle des sages
Il semble que le VIème siècle avant J.C., une époque de confusion et d’instabilité, ait besoin d’une « mutation », d’une révolution spirituelle, pour s’affranchir de ses dogmes qui l’opprimaient, et découvrir une vision culturelle propre à ce siècle révolutionnaire. Le siècle qui avait engendré le sage Zoroastre dans les contrées désertiques de la Perse, engendra également Gautama le Bouddha en Inde, et les sages Conficius et Lao-tseu en Chine.


11/10/2013


A la même époque, en Grande Grèce, des sages, comme Pythagore, et après lui, Socrate, ont créé la philosophie et la conception théorique, une conception issue de la sagesse orientale mais évoluant vers la logique et l’ "anti-mythe".

L’être vertueux
Au sud du Chang-toung, dans le petit Etat de Lou, naît en 551 avant J.C. le second fils d’une famille pauvre, du nom K’iou et pour surnom Tchong-ni. Se consacrant aux études, il préconise, tout en les enseignant, l’étude des six disciplines traditionnelles : le tir à l’arc, la conduite des voitures, les mathématiques, la calligraphie, la musique et l’étiquette. Ses élèves l’appelleront K’ong Fou-tseu (maître K’ong). En Occident, il sera connu sous le nom de Confucius.
Profondément conservateur, Confucius admet que les relations sociales doivent être basées sur un code. A travers ce code, des règles de conduite stéréotypées doivent s’imposer à chaque catégorie d’individus.
Sceptique à l’égard du surnaturel, n’acceptant pas les idées religieuses de son temps, il dira : « Nous ne connaissons pas encore la vie ; comment pourrions-nous connaître la mort   » Organisateur des mœurs anciennes, il cultive le li (le sens rituel, qui se traduit par un cérémonial codifié réglant l’emble du comportement social et religieux).
Selon Confucius, le savoir ne doit pas être une fin en soi, en l’étudiant, l’homme doit le mettre en pratique, affirmer son caractère et développer en lui le sens de l’équité (Yi). Ainsi, il se comportera en Kiun-tseu, en homme supérieur, sans jamais laisser ses désirs le détourner de l’équité et de la justice.
Etre vertueux, c’est remplir les devoirs assignés à la place qu’on occupe. La société est un corps où la vertu de chaque individu détermine celle de l’ensemble. Le corps social, selon lui, est à l’image de l’Univers, et la communion des êtres est en fonction de l’ordre secret des choses. Cette harmonie résulte de la volonté céleste (ming) qui trace à chaque homme la voie (tao) qu’il suivra pour se conformer à l’intérêt de tous ; l’existence de chaque homme doit être en accord avec l’ordre universel.

Le Tao
Tandis que le confucianisme s’occupe des relations sociales, le taoïsme tend vers l’élévation d’esprit et le détachement des choses de ce monde. Les Chinois lui doivent l’amour de la liberté de pensée, la longue patience, la sérénité dans le malheur et l’endurance au travail.
Le taoïsme est la doctrine du tao. Le mot Tao signifie la Voie, mais il veut dire aussi Principe (de toutes choses). Il est éternel, omniprésent et incompréhensible. Il est le non-être, mais par l’alternance de ses modalités Yin et Yang, il a créé le ciel et la terre, ainsi que les êtres. De là le concept du vide chez les Chinois qui est plus important que la forme. Il s’ensuit aussi une morale du vide qui correspond à la quiétude, à l’indifférence et même à l’inaction.
« Ne pas agir, ne pas innover pour ne pas gêner l’évolution cosmique. Ne pas s’éloigner de l’origine, de l’unité, se conformer au Tao : voilà la sagesse. » (Voir la Sagesse chinoise selon le Tao, Phon, 1955).
Contemporain de Confucius, Lao-tseu (570- 490 av. J.C.), après avoir assimilé une haute culture philosophique, et écœuré par le désordre dû à l’anarchie féodale, se décida de partir pour l’Occident, monté sur un bœuf. En cours de route, il fut invité par le gouverneur d’une marche, auquel il a laissé son unique écrit, le Tao Te King (Livre de la Voie et de la Vertu). Ce petit opuscule est devenu l’arche sainte du taoïsme.
Définissant le Tao, Lao-tseu écrit :
«  Il n’avait pas de nom quand parurent le ciel et la terre.
Quand il eut créé les être il eut un nom.
Dans ces deux états, avec ou sans nom, il a tout créé. »
Les sages du taoïsme insistaient sur la succession du Yin et du Yang dans la création de l’univers. Le Yin est le nord ; il est froid, statique, obscur et implique la terre, tandis que le Yang, le sud, est chaud, dynamique, lumineux et implique le ciel. Dans cette création, ces sages distinguaient quatre périodes : la grande mutation, la grande origine, le grand commencement et le grand dévidage.
Parlant de la conception de l’univers chez les « Pères du taoïsme », Henri Bernard Maître écrit : « Du sein de la nébuleuse originelle, du milieu de l'éther primordial, ils avaient vu la matière s’organiser, les constellations apparaître, la brande immense de l’évolution se poursuivre avec ses phases de création et ses retours au chaos, à travers le temps éternel ». (Sagesse chinoise et philosophie chrétienne).
Dans le Yi King (Livre des métamorphoses), le plus ancien des livres chinois, il était question de cet ordre cosmique et la possibilité d’établir l’harmonie en soi-même, correspondant aux rythmes du cosmos. Le Tao, loi éternelle qui préside à l’universel devenir, est en même temps loi naturelle et loi morale qui en est le reflet. (Cf. Roger Garaudy ; Appel aux vivants, Seuil, 1979).
Chez les taoïstes, le Grand Tout est le vide primordial. Tout en sort et tout y revient. Et comme « tout est dans tout », tout naît de la composition des deux principes contraires, le Yin et le Yang, même le devenir. Ces deux principes ne sont pas en lutte, comme chez les Perses, mais complémentaires. Le Tao, comme l’a perçu Roger Garaudy, « est la loi de leur alternance et de leur conjugaison », de leur harmonie. Engendrée par un fondement cosmique, la communauté reproduit cet ordre cosmique.


26 septembre 2014

Maïmonide


Moïse Maïmonide, celui que Thomas d'Aquin appelait "l'aigle de la synagogue".

Maimonide est un esprit brillant, rédigeant de nombreuses œuvres et introduisant la philosophie aristotélicienne dans la pensée juive. Parlant et écrivant couramment l’arabe et le syriaque, il rédige certaines de ses œuvres en hébreu, ce qui est original pour l’époque. Son œuvre est plurielle : des traités de jurisprudence (citons le Livre des commandements, qui est toujours le socle de la loi rabbinique), de logique (il écrit à l’âge de 20 ans un petit traité de logique, aujourd’hui encore une œuvre d’une grande pédagogie et d’une grande clarté pour qui veut aborder la logique grecque), de théologie. Relisant les textes religieux, compilant la Torah et les exégèses, cherchant à concilier la tradition écrite et orale, il modernise en profondeur le judaïsme médiéval en général et la Halakha en particulier. Ce qui n’est pas forcément du goût de tous : son Commentaire sur la Mishna , rédigé en hébreu durant les années 1170, est très mal reçu en Occident, au point que – bien étrange connexion culturelle – les juifs de Provence le feront brûler par les inquisiteurs dominicains durant le XIII ème siècle. Mais bien vite, Maimonide est reconnu comme le maître de l’étude talmudique …
Approfondissons la connaissance du maître...

25 septembre 2014

The letter to Germar Rudolf (2000)



ROGER GARAUDY
PARIS , November 17th, 2000

Ladies and gentlemen,

I want to offer my personal testimony on behalf of Mr GERMAR RUDOLF several of whose writings, especially his widely known “Rudolf Report”, I have read with admiration.

Born in Marseille (France) on 17 July, 1913, I have a Doctorate in philosophy
(Sorbonne), a Doctorate in science, and I was recently made "Doctor Honoris
Causa" of the University of Konya (Turkey).

In the course of my life I have written 54 books on philosophical, political or religious topics. Most of them have been translated in 10 or 15 languages, and 14 doctoral dissertations have been dedicated to my works, which earned me an international reputation. Among them: THE MEDITERRANEE PRIZE in Italy, and, in May 1999, the Gold Medal for "services rendered to human values" which was awarded to me by a Greek jury in Athens, not counting the homage paid to me during my life for my objectivity and coming from personalities of quite diverse perspectives such as Jean-Paul SARTRE or the General DE GAULLE, the poet SAINT-JOHN PERSE or the Brazilian archbishop Dom HELDER CAMARA, the great Jewish violinist YEHUDI MENUHIN or the Protestant theologist MOLTMAN (Theologie de l'Espérance - Theology of Hope).

When Hitler's armies invaded France I was arrested on September 14, 1940, and I was 33 months in jail and in concentration camp until the Americans landed in Algeria where I became the editor of RADIO-FRANCE.  When I came back to France, I was elected as deputy, then vice-chairman of the National Assembly, then Senator.

My difficulties started in 1982 because I had signed, in the daily "Le Monde", together with the catholic priest  Michel LELONG and the Protestant pastor MATTHIOT, a strong protest against the Israeli invasion in Lebanon. The French Zionist organizations brought an action against us and we won it, because, as per the judgment, we had made a "licit appreciation" of the policies of a State and of the ideology on which it is based, but it was not racial incitement.

On the other hand, as that "abominable law" (called the Fabius-Gayssot law) had been passed in the meantime (and which punishes anyone challenging the findings of the Nuremberg Tribunal), new accusations were laid against me when I published my book "LES MYTHES FONDATEURS DE L'ETAT D'ISRAEL" (The Founding Myths of the State of Israel), the main purpose
of which was to make a distinction between Judaism, a religion which I have respect for, and atheistic political Zionism (dating from its founder THEODOR HERZL) which is mainly nationalist and colonialist; I showed that such a colonialism (which I have fought against in all the countries in the world, including France) could trigger off a third world war. The recent events, unfortunately, have only too well justified those fears. Subsequently, I was convicted in accordance with the GAYSSOT law and as a fabrication was being made out of my text by mutilating it.

I have now lodged an appeal with the EUROPEAN COURT OF JUSTICE against that unfair verdict based on a forgery. I have mentioned my personal experience only to show how much the "human rights" and the "freedom of expression" are systematically infringed in Europe.

My book about "THE MYTHS" has been translated into 32 languages and a second edition has just been issued in America. Now, only in France have
I been brought before the courts. I understand even less the political persecutions in Germany against Mr Germar RUDOLF because I read his books, and in particular his "RUDOLF REPORT" which is a purely scientific book and which can only arouseanger with those who are afraid of the simple scientific truth.
I like to hope that the United States, whose Constitution radically excludes prosecuting anyone for his beliefs,  shall grant Mr Germar RUDOLF political
asylum, so that he may carry on with his research work as a chemist
in the safety and the peace owed to all scientists.

23 septembre 2014

A Rabat, quand les théologies chrétiennes s'ouvrent à la compréhension de l'Islam

A Rabat, catholiques et protestants s’ouvrent ensemble à l’islam

Inauguré à Rabat les 19 et 20 septembre, l’institut Al Mowafaka proposera aux catholiques et protestants des formations théologiques ouvertes sur l’islam.

Précédée d’un concert et d’une célébration œcuménique, la cérémonie d’inauguration, orchestrée par Mgr Vincent Landel, archevêque de Rabat, et Samuel Amédro, président de l’Eglise évangélique au Maroc, tenait en un colloque international où étaient conviés aussi bien des religieux que des académiques, des Marocains que des étrangers, sur le thème « Penser avec l’autre la foi et les cultures ».
La formation théologique de l’institut Al Mowafaqa s’adresse aux chrétiens, d’Europe ou d’Afrique, qui souhaiteraient se former au Maroc pour « approfondir leur connaissance de l’islam dans le contexte d’une société arabo‑musulmane ouverte sur le continent africain (…) et développer leurs aptitudes à la rencontre de l’autre et au dialogue ». L’enseignement de l’arabe (classique et dialectal) est partie intégrante du programme.
L’institut est organisé en deux pôles ; l’un est universitaire et comprend la théologie ainsi que les sciences des religions ; l’autre est culturel, et comprend toute activité de création visant à promouvoir le dialogue des cultures.
Le diplôme (une licence en théologie ou bien un certificat équivalent à un semestre universitaire intitulé « dialogue des cultures et des religions »), y est délivré par l’institut de science et de théologie des religions de l’institut catholique de Paris, en partenariat avec la faculté de théologie protestante de Strasbourg.
L’institut s’adresse donc aux deux branches principales de la religion chrétienne, les cultes catholique et protestant. Les cours y seront généralement dispensés à deux voix, par un enseignant catholique et un enseignant protestant.

Badr Esaoudi

19 septembre 2014

Marx dogmatique= Marx trahi



KARL MARX a fait au milieu du 19ème siècle, à partir
de l'exemple du capitalisme anglais, c'est-à-dire du
capitalisme le plus développé de son temps, une
analyse de ce capitalisme qui reste fondamentalement
valable.
En particulier, en ce qui concerne la théorie de la
croissance, le rapport algébrique qu'il a établi
dans le développement du capitalisme anglais du 19ème
siècle, entre la production des moyens de production
et celle des produits de consommation, pour assurer
une croissance optimale demeure après un siècle,
comme le reconnaît le prix Nobel, Samuelson, dans
son traité d'économie politique, la seule loi valable
après un siècle.
Mais ceux qui se disent les disciples de MARX, notamment
les dirigeants soviétiques, et ceux des partis communistes
qui les ont suivi, ont radicalement transformé la théorie
de MARX.
MARX avait fait une remarquable théorie descriptive du
développement du capitalisme anglais du milieu du 19è
siècle. Ces faux disciples annonçaient "une loi normative
du développement du socialisme à la fin du 20è siècle.
C'est l'erreur théorique fondamentale qui a eu
pour conséquences d'intégrer le système soviétique
au modèle capitaliste de croissance, c'est-à-dire,
d’empêcher de considérer l'Union Soviétique comme un
pays socialiste et d'engager les partis communistes
soviétisants dans la voie du productivisme aveugle
caractéristique de l'économie capitaliste. D'un socialisme,
que MARX ne définissait pas seulement par ses moyens,
la socialisation des moyens de productions mais
qu'il définissait par ses fins en disant:
"Est socialiste un régime qui crée toutes les
conditions économiques, politiques et culturelles
pour que chaque enfant qui porte en lui le génie de
Raphaël ou de Mozart puisse devenir RAPHAËL ou MOZART".
A l'inverse le modèle occidental de croissance consiste
à produire de plus en p]us, et de plus en plus vite
n'importe quoi, utile, inutile , nuisible, voire
mortel comme l'armement.
La leçon de cette erreur fondamentale n'a pas été
tirée par la plupart des partis communistes.
Etre marxiste, ce n'est pas répéter dans des
conditions historiques radicalement différentes ce
que MARX disait admirablement au milieu du 19è siècle.
Etre marxiste, c'est nous comporter dans notre analyse
et notre action à l'égard du monde d'aujourd'hui avec
la même lucidité que MARX à l'égard du sien.
Le marxisme, c'est essentiellement une méthodologie
de l'initiative historique permettant de découvrir
à partir de l'analyse des contradictions spécifiques
d'une époque et d'un pays le projet capable de surmonter
ces contradictions.
MARX était tout le contraire d'un dogmatique. Au moment
même, où dans Le capital, il élaborait les notions
clés de sa doctrine, la théorie de la valeur et de la
plus-value, au même moment […] il définissait les
caractères de l'époque historique où ces lois
cesseraient d'être valables.
Ceci est vrai de sa philosophie comme de sa théorie
économique.
Par exemple: il considérait la religion comme opium
du peuple dans une Europe dominée par l'esprit de
la Sainte Alliance. Il n'avait pas la prétention
d'extrapoler à tous les temps et à toutes les époques
où dans des conditions historiques déterminées, la
religion peut devenir non pas un opium mais un levain.

Mais l'exemple d'humilité scientifique donné par MARX
n'a pas été suivi par ses disciples.
En les lisant et surtout en jugeant leurs actions,
MARX répéterait sans doute ce qu'il disait de ceux
de ces "épigones" qui définissaient sa doctrine comme
un déterminisme économique :
"Si c'est cela le marxisme, moi, MARX, je ne suis pas marxiste ."

Roger Garaudy

NDLR : Texte dactylographié. Non daté. Une phrase manque [entre crochets]

16 septembre 2014

Romain Rolland et sa lettre à Roger Garaudy


Pauvres moutons! Si nous n'avions à nous défendre que du loup, nous saurions bien nous en garder. Mais qui nous gardera du berger!
Romain ROLLAND (Colas Breugnon)

 Eh! l'ordre a bien son prix! Mais il n'est pas pour rien, et il se fait payer. L'ordre, c'est ne pas faire ce qu'on veut, et c'est faire ce qu'on ne voudrait pas. C'est se crever un oeil, pour mieux voir avec l'autre. C'est abattre les bois pour y faire passer les grandes routes droites. C'est commode, commode... Mais bon Dieu! que c'est laid!
Romain ROLLAND (Colas Breugnon)

O vous, sortis de moi, qui boirez la lumière, où mes yeux qui l'aimaient ne se baigneront plus, par vos yeux je savoure la vendange des jours et des nuits à venir, je vois se succéder les années et les siècles, je jouis tout autant de ce que je pressens que de ce que j'ignore. Tout passe autour de moi ; mais c'est que, moi, je passe: je vais toujours plus loin, plus haut, porté par vous. Je ne suis plus lié à mon petit domaine. Au-delà de ma vie, au-delà de mon champ s'allongent les sillons ; ils embrassent la terre, ils enjambent l'espace ; comme une Voie Lactée, ils couvrent de leur réseau toute la voûte azurée. Vous êtes mon espérance, mon désir, et mon grain, qu'à travers l'infini je sème à pleines mains.
Romain ROLLAND (Colas Breugnon)

J'ai fait tout mon possible pour que mes cinq enfants ne soient pas étouffés par leur respect pour moi ; j'y ai assez réussi ; mais quoique vous fassiez et malgré qu'ils vous aiment, ils vous regardent toujours un peu en étranger: vous venez de contrées où ils n'étaient pas nés, et vous ne connaîtrez pas les contrées où ils vont ; comment pourriez vous donc vous comprendre tout à fait? Vous vous gênez l'un l'autre, et vous vous en irritez... Et puis, c'est terrible à dire: l'homme qui est le plus aimé ne doit que le moins possible mettre l'amour des siens à l'épreuve: c'est tenter Dieu. Il ne faut pas trop demander à notre espèce humaine. De bons enfants sont bons ; je n'ai pas trop à me plaindre. Ils sont encore meilleurs quand on n'a pas à recourir à eux. J'en dirais long si je voulais... Enfin, j'ai ma fierté. Je n'aime pas reprendre leur pâtée à ceux à qui je l'ai donnée.
Romain ROLLAND (Colas Breugnon)

La meilleure façon de défendre sa maison, c'est de défendre celle des autres.
Romain ROLLAND (Colas Breugnon)

Ainsi, l'on est plus riche , plus on est dépourvu : car l'esprit crée ce qui lui manque: l'arbre touffu que l'on élague monte plus haut. Moins j'ai et plus je suis...
Romain ROLLAND (Colas Breugnon)


Découvrez Romain Rolland sur http://www.association-romainrolland.org/
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En 1938, Roger Garaudy soumet un manuscrit à l'appréciation du Prix Nobel de Littérature 1915 (décerné en 1916). Voici la réponse de Romain Rolland le 11 mai 1939. Le manuscrit de Roger Garaudy, Le  huitième jour de la création, sera publié en 1945.

Vezelay (Yonne) 14 grand'Rue St Etienne
11 mai 1939

Cher Roger Garaudy

J'ai lu votre lettre avec émotion, avec affection. Je vous remercie, vous et votre
femme, de la confiance que vous me témoignez depuis tant d'années, et que
vous exprimez seulement aujourd'hui. C'est par de telles adhésions de l'âme,
secrètes, muettes, que je me suis senti soutenu, aux heures les plus solitaires
de ma vie.
Je suis heureux que vous repreniez la mission de CHRISTOPHE, qui est de
relier entre elles les grandes forces de vie, saines et sincères. Et cette union
n'est nulle part plus souhaitable qu'entre les forces religieuses de foi et
d'amour agissant, et les forces de foi et d'action sociale. Sur le terrain des faits,
une alliance conditionnelle est aujourd'hui facilement réalisable. Mais vous
voulez davantage, et je le voudrais aussi. Nous voudrions, par une union intime,
la réalisation de l'intégralité de la personne humaine.
C'est le plus haut idéal de l'esprit. Il ne faut pas se désespérer, s'il est difficile
au plus grand nombre d'y atteindre. Ce serait déjà beaucoup, s'ils en
concevaient la vision et le désir. La vie est faite pour aspirer éternellement à
plus d'espace, plus d'éternel. L'étemel n'est jamais fixé, jamais atteint. Il est en
marche. Il est le mouvement même pour y atteindre.
Peut-être, d'ailleurs, minimisez-vous l'obstacle qui sépare les "libres penseurs"
des chrétiens. Celte "fissure pour la grâce", que vous implorez pour vos frères
communistes, dans "leurs âmes cuirassées d'orgueil", - ce n'est pas tant
l'orgueil qui les en défend ! Vous vous trompez. C'est quelquefois l'humilité. Je
le disais précisément, il y a quelques jours, à un jeune abbé qui venait me voir.
Il me parlait de l'humilité, comme l'une des principales vertus de l'esprit. Et je
lui disais : "C'est elle qui m'a interdit la foi". - Et lui : - c'est elle qui m'y a
introduit."
Là est le tragique du malentendu. Là est aussi sa grandeur. Chez les meilleurs
des incroyants, l'ardeur de vie, l'élan, l'action, le dévouement à la tâche, à la
cause, ou au prochain, sont dépouillés de la certitude de l'absolu - de tout
absolu. Ils ne le nient pas. Mais ils ne se croient pas le droit de l'affirmer, n'en
ayant aucune raison sûre. Et ils se bornent à penser selon la raison qui leur est
donnée, tout en sachant sa relativité ; que pourrait leur reprocher un DIEU ?
Ne sont-ils pas de bons serviteurs, loyaux, fidèles, qui font la tâche qui leur est
confiée ? S'ils sont infirmes, un père en veut-il à son fils aveugle ? ce n'est pas
aux autres fils, qui voient ou qui croient voir, de se substituer au père dans ses
jugements. Que chacun croit ou ne croit pas, mais fasse sa tâche,
honnêtement, sincèrement, en s'efforçant de comprendre, en tolérant et en
aidant son prochain ! L'intégralité de l'homme se réalisera en la totalité (des
puissances actives et fécondes) du genre humain. Libre aux meilleurs d'en
façonner en eux l'ébauche !
Je ne lis jamais plus de manuscrits : car je suis vieux, souffrant, chargé de
tâches, dont j'ai à peine le temps d'accomplir le plus urgent. - Mais j'ai lu le
vôtre, et je vous demande la permission de vous en parler, en toute franchise
fraternelle.
L'oeuvre est inégale. Elle est, en certaines parties, chargée de pensée profonde
et pathétique. En d'autres (celles de la fin) elle n'est pas arrivée à son point de
maturité. Sa qualité et son défaut est d'être une Confession, qui ne peut pas
cire complète, et qui sait mal s'objectiver. Selon mon impression, (qui peut
être fausse), il était un peu trop tôt pour l'écrire, vous n'avez pas assez de recul.
11 me semble que les éléments autobiographiques, qui sont le plus vrai et le
meilleur, se mêlent à des éléments d'invention, peut-être faits pour les
dépasser ; et ils ne s'accordent pas bien ensemble. La vie qu'on rêve, à vingt
cinq ans, et dont on s'enchante, s'ajuste souvent assez mal à la vie qu'on a ; et
en dépit de nos préférences, c'est la vie qu'on rêve, qui a tort (au moins en art).
Je l'ai éprouvé, pour mon compte, quand j'écrivais ma première oeuvre, où
j'avais mis toutes mes fièvres : je sentais vrai (je le croyais), j'écrivais faux. Et
j'oscillais entre le mièvre et le brutal.
Je suis surtout frappé par la deuxième partie de votre récit.
C'est le plus solide, le plus viril. Et c'est le noeud de la tragédie de pensée. Vos
hommes me semblent plus vrais et plus vigoureusement peints que vos
femmes, - sans doute parce que celles-ci, vous les aimez - Il y a pourtant
beaucoup de touches excellentes dans la figure de MILAINE.
Un malentendu qui s'élève entre les deux amants greffe sur le problème
principal une autre question, qui est plutôt suggérée que proposée en termes
nets, et qu'il eut peut-être été mieux d'écarter, car elle complique inutilement
la difficulté : c'est l'opposition protestantisme - catholicisme. Elle met l'accent,
dans tout le livre, sur le pur et rigide esprit protestant. Et le livre n'est nulle part
meilleur que quand cet esprit s'exprime dans toute sa pureté, dégagé des
autres effluves : car, dans ceux-ci, il se contraint, - ou se raidit - il n'est jamais
tout à fait à son aise
La conclusion est trop hâtive. L'apaisement - qui doit venir - est obtenu trop
brusquement, par volonté de finir. L'harmonie, "qui est la plus belle quand elle
s'opère entre les dissonances" (vous connaissez la parole d'HERACLITE que
j'aime à citer), ne peut-être le fruit que d'une longue suite d'épreuves et
d'efforts, sanctifiés par un loyal amour, tendre et vaillant. Et c'est pourquoi :
l'histoire du "PREMIER JOUR DE MA VIE" gagnerait à être écrite lorsqu'on en a
parcouru déjà le ou les suivants.
Voici mes premières impressions, - trop rapides - Elles gagneraient à profiter du
conseil que je viens de donner ; - attendre d'avoir relu et médité à loisir.
- Mais je suis pressé par le temps.
Pour l'instant, j'en ai assez vu pour connaître le grand sérieux et la solidité du
fond de votre âme et de votre art. J'ai pleine confiance dans votre avenir.
J'adresse au jeune couple mon affectueuse amitié, et vous prie de me croire,
cher Roger GARAUDY, votre cordialement dévoué.

Romain ROLLAND

Source: Mes témoins, Editions  A contre-nuit, pages 11 à 15, 

VOIR AUSSI: http://rogergaraudy.blogspot.fr/2012/10/1939-romain-rolland-roger-garaudy.html