19 septembre 2010

Y-a-t-il un processus de paix au Proche-Orient ?

A CONTRE-NUIT/Numéro 4/ automne 1999
 




 
Sommaire:
 Le colonialisme israélien, par Roger Garaudy
Les négociations de paix au Proche-Orient, par Javier Peña (non reproduit)
La Palestine: résolutions des Nations-Unies, par Edgard André
 Le viol de Jérusalem, par Isabelle Coutant Peyre




LE COLONIALISME ISRAELIEN
par Roger Garaudy

Le sionisme, d'où est né l'Etat d'Israël, est, dès l'origine jusqu'à nos jours, une doctrine et une pratique colonialistes.
Son "Père spirituel", THEODORE HERZL (1860-1904), le 11 janvier 1902, demandait à CECIL RHODES, le fondateur de la première "Compagnie à Charte" d'Afrique sous protection coloniale anglaise, qui préludait, en Afrique du Sud, au démembrement colonial de l'Afrique: "Je vous en prie, envoyez-moi un texte disant que vous avez examiné mon programme et que vous l'approuvez. Vous vous demandez pourquoi je m'adresse à vous, Monsieur RHODES ? C'est parce que mon programme est un programme colonial. Je vous demande de donner le poids de votre autorité au projet sioniste." (Journal de Th. HERZL, Tome III, p. 1194)
L'idée directrice de HERZL est en effet d'appliquer au Moyen Orient, en jouant des rivalités des puissances coloniales, le scénario réalisé en Afrique du Sud par CECIL RHODES en 1889 par la Charte accordée par le Premier ministre anglais Lord SALISBURY, avec une subvention d'un million de livres sterling de ROTHSCHILD. HERZL promet tour à tour aux Anglais, si on lui accorde un territoire, d'être un poste relais pour protéger la Route des Indes, fût-ce en Ouganda que lui proposa le gouvernement anglais, puis aux Allemands d'être un relais et un point d'appui sur la voie de pénétration au Moyen Orient qu'ils songeaient à ouvrir par une ligne de chemin de fer: Berlin-Byzance-Bagdad. Après une entrevue avec le KAISER GUILLAUME II, il écrit: "Lorsque je lui ai proposé mon affaire: la Compagnie à Charte et protectorat allemand, il opina favorablement." (Journal T. I, p.268)
D'une manière plus générale THEODORE HERZL offrait ses services à tous les colonialistes. Dans son livre: L'Etat juif (1895) il écrit: "Pour l'Europe nous constituerons là-bas un morceau de rempart contre l'Asie, nous serions la sentinelle avancée de la civilisation contre la barbarie." (Ed. Lipschutz, Paris 1926. p.95)
Ce "là-bas", qui désigne la Palestine, marque le deuxième élément de la stratégie de HERZL (et des futurs dirigeants israéliens): l'instrumentalisation de la religion au service d'une politique.
HERZL est athée: "J'ai dit au Grand Rabbin de Londres, comme je l'avais dit à ZADOC KAHN, Grand Rabbin de Paris, que je n'obéissais à aucun mobile religieux dans mon projet." (Journal T. I, p.270 de l'Edition anglaise, en date du 23 novembre 1895). Il ajoute, le 26 novembre, dans une interview au rédacteur du JEWISH CRHONICLE de Londres qui lui demandait: "Quelle est votre relation avec la BIBLE ? Je lui ai répondu: Je suis libre penseur." (ibidem)
C'est pourquoi il avait accepté, comme "terre promise, l'Ouganda, le Mozambique, l'Argentine, Chypre ou la Tripolitaine, mais ses amis lui firent remarquer que la Palestine constituerait un mot d'ordre plus mobilisateur pour les juifs pieux." Il utilise donc ce qu'il appelle lui-même "la puissante légende" (T. I, p.56) celle du "retour", martelant le slogan: "La Palestine est notre inoubliable patrie historique" (L'ETAT JUIF, p.45) qui constitue, écrit-il: "un cri de ralliement d'une irrésistible puissance."
Cette contradiction (pour ne pas dire cette imposture) s'est manifestée tout au cours de l'histoire d'Israël et place aujourd'hui cet Etat au bord de l'éclatement: Le Ministère israélien de l'Intérieur reconnaît qu'il n'y a, en Israël, que 15 % de juifs religieux; il est pourtant nécessaire de faire croire aux 85 % des autres que cette terre leur a été donnée par un DIEU auquel ils ne croient pas.
NATHAN WEINSTOCK, dans son livre: LE SIONISME CONTRE ISRAEL (Ed. Maspero. 1969, p.316) analyse ce paradoxe: "Si l'obscurantisme rabbinique triomphe en Israël, c'est parce que la mystique sioniste n'a de cohérence que par référence à la religion mosaïque. Supprimez les concepts de `Peuple élu' et de `Terre promise', et le fondement du sionisme s'effondre. C'est pourquoi les partis religieux puisent paradoxalement leur force dans la complicité des sionistes agnostiques. La cohérence interne de la structure sioniste d'Israël a imposé à ses dirigeants le renforcement de l'autorité du clergé. C'est le parti social-démocrate `MAPAI', sous l'impulsion de BEN GOURION, qui a inscrit les cours de religion obligatoires au programme des écoles, et non les partis confessionnels."
Aucun gouvernement, qu'il émane du LIKOUD ou de partis dits TRAVAILLISTES, ne peut échapper au joug de ces religieux fanatiques formés à Brooklyn (les Etats-Unis comptent un nombre de juifs plus grand qu'Israël) et opératifs à Hébron, où ils fabriquent des criminels de droit divin tels que l'assassin du Président RABIN ou celui des musulmans en prière au tombeau des Patriarches.
Les révélations des "nouveaux historiens" israéliens soulignent, avec BENNY MORRIS qu'en ce pays "il ne s'agit pas de `nouvelles histoire' mais d'histoire tout court puisqu'avant il n'y avait que de la mythologie." ou avec le Professeur ZEEV STERNHELL de l'université hébraïque de Jérusalem, auteur du livre: LES MYTHES FONDATEURS DU NATIONALISME ISRAELIEN (1977) reconnaissant que: "jamais la remise en cause de nos mythes fondateurs n'avait été si répandue." (Le Monde, 4 avril 1998)
Les récents affrontements entre ceux qui veulent secouer le joug des "talibans" d'Hébron est une autre manifestation de cette contradiction fondamentale entre la foi prophétique qui est une religion dont nous vivons encore, et le sionisme qui est une politique qui conduit à la mort car le colonialisme est sa seule constante, sous quelque gouvernement que ce soit.
Toute le politique des dirigeants sionistes porte la marque de cette duplicité.
Profitant des rivalités colonialistes au cours de la première guerre mondiale, les sionistes obtiennent la "Déclaration Balfour" de novembre 1917, par laquelle les Anglais devançaient la diplomatie allemande au moment où celle-ci s'apprêtait à accorder son protectorat à une "Compagnie à Charte" sioniste en Palestine, selon les plans d'ISSAC STRAUSS, disciple de HERZL, qui avait fondé, en 1916, en Amérique The American Jewish Chronicle, organe de propagande pro-allemande. La Déclaration Balfour, adressée à Lord WALTER ROTHSCHILD, promet "un foyer national pour le peuple juif en Palestine."
L'écrivain ARTHUR KOESTLER a sans doute donné la meilleure définition de cette lettre ANALYSE D'UN MIRACLE: "C'est un document par lequel une nation promet solennellement à une autre nation, le territoire d'une troisième nation, bien que la nation, mais une communauté religieuse, et le territoire, au moment où il était promis, appartenait à une quatrième nation: la Turquie."
La guerre permit le dépeçage de l'Empire ottoman, bricolé d'avance par les accords SYKES-PICOT, le 16 mai 1916, par lequel l'Angleterre et la France se partageaient le Moyen-Orient.
Dans le partage des dépouilles du Traité de Versailles du 28 juin 1919, la Palestine fut placée sous mandat britannique. BALFOUR lui-même déclarait: "J'ai peine à concevoir comment le président WILSON pourra concilier son adhésion au sionisme avec la doctrine d'autodétermination." (La Palestine comptait alors 92 % d'Arabes.) Peu importait: dès 1904 ZANGWILL (dans une déclaration que reprendra Madame GOLDA MEIR plus tard) préconisait de "donner une terre sans peuple à un peuple sans terre", alors qu'avec 600.000 Arabes la densité de population de la Palestine était égale à celle de la moyenne des départements français.
Le mandat britannique permit à la colonie sioniste de passer de 80.000 habitants en 1922 à 640.000 en 1948. Dès lors "l'épuration ethnique" pouvait se développer. Dans son introduction à L'HISTOIRE DE LA HAGANAH, publiée par l'"Organisation sioniste mondiale", le Ministre de l'Education nationale d'Israël sous BEN GOURION écrit: "Dans notre pays il n'y a de place que pour les juifs."
Le 16 septembre 1948 le comte BERNADOTTE, représentant des Nations Unies, dépose son rapport (Document A.648) protestant contre les exactions commises au nom de cette doctrine. Le 17 septembre il est assassiné à Jérusalem. Son assassin, NATHAN FRIEDMAN-YELLIN, est, deux ans après, élu député à la Knesset.
La création de l'Etat d'Israël par une décision de l'ONU de "partage" de la Palestine, le 29 novembre 1947, avait ouvert définitivement la porte à la colonisation systématique: à cette datte les colons possèdent 5,6 % des terres, l'Etat sioniste reçoit 56 % du territoire.
Le vote de ce plan de partage donna lieu à des manoeuvres sordides. Le 18 décembre 1947 un membre du Congrès américain, LAWRENCE H. SMITH, les évoqua devant le Congrès: "Voyons ce qui se passa à l'Assemblée des Nations Unies durant la réunion précédant le vote du partage. Les deux-tiers des votes étaient requis pour approuver la Résolution Par deux fois le vote fut remis pendant ce temps, une forte pression fut exercée sur les délégués de trois petites nations Les votes décisifs furent ceux de Haïti, du Libéria, et des Philippines. Ces votes suffirent à emporter la majorité des deux-tiers. Auparavant ces pays étaient opposés au partage Les pressions exercées sur eux par nos délégués, nos officiels, et des citoyens américains, constituent un acte répréhensible." (U.S. Congressional record, P.1171)
DREW PEARSON, dans le Chicago Daily du 9 février 1948, donne des précisions, dont celle-ci: "HARVEY FIRESTONE propriétaire des plantations de caoutchouc au Libéria, agit auprès du gouvernement libérien"
Le Président TRUMAN exerça une pression sans précédent sur le Département d'Etat. Le Sous-Secrétaire d'Etat SUMMER WELLES écrit: "Par ordre direct de la Maison blanche les fonctionnaires américains devaient user de pressions directes ou indirectes afin d'assurer la majorité nécessaire au vote final." (We need not fail, 1948, p.63)
Le Ministre de la Défense d'alors, JAMES FORRESTAL, confirme: "Les méthodes utilisées pour faire pression, et pour contraindre les autres nations au sein des Nations Unies, frôlaient le scandale." (Mémoires de FORRESTAL. 1951, p.363) .Dès lors, la protection des Etats-Unis fut inconditionnelle: les dirigeants sionistes d'Israël constituaient pour eux un porte-avion insubmersible pour leur domination du Moyen-Orient qui peut se permettre de violer toutes les décisions et condamnations de l'ONU grâce au véto opposé par les USA à toute sanction. BEN GOURION disait déjà (New York Times du 6 décembre 1953): "l'Etat d'Israël considère que la résolution des Nations Unies du 29 novembre 1947 (sur le partage) est nulle et non avenue."
L'invasion et la colonisation peuvent dès lors se déployer pleinement.
Mais il importe de situer clairement les responsables.
Ce n'est pas la "communauté juive" qui est coupable, mais une minorité sioniste. La foi juive est une religion qu'il importe de respect; le sionisme est une politique, une politique colonialiste qui divise le monde et engendre les guerres et les massacres, comme tous les autres colonialismes.
La distinction est aisée. HITLER même ne s'y trompait pas: lorsqu'il arriva au pouvoir, en 1933, sur 100 juifs organisés, 95 % l'étaient dans une "Association de citoyens allemands de religion juive" (tout comme il existait des associations catholiques ou protestantes.) 5 % seulement appartenaient à l'organisation sioniste. Les nazis n'hésitèrent pas à faire alliance avec les groupes sionistes qui préconisaient le départ pour la Palestine, ce qui répondait aux voeux des hitlériens: vider l'Europe de ses juifs, et ils s'acharnèrent contre les autres juifs allemands. En 1937 le principal théoricien du national-socialisme, Alfred ROSENBERG0, écrivait: "Le sionisme doit être vigoureusement soutenu afin qu'un contingent annuel de juifs allemands soient transportés en Palestine." (Der spur des Juden in Wandel der Zeiten, Munich 1937. p.153)
Cette collaboration ne s'est jamais démentie pendant toute la guerre sous des formes différentes: dès 1933 par un accord économique: la "Haavara", qui permettait aux juifs riches de donner caution à une banque de Hambourg. Ils pouvaient alors émigrer en Palestine où ils recouvraient à Tel Aviv leur versement. En échange les dirigeants sionistes promettaient de combattre, dans le monde, le boycott économique de l'Allemagne nazie.
Cela dura cinq ans, jusqu'en 1938, et permit aussi aux groupes sionistes du Betar, de porter leur uniforme et leur drapeau et d'organiser leurs camps de formation.
Après le pogrom de la "Nuit de Cristal" les militants sionistes jouèrent un rôle de premier plan dans les biens des juifs, et exerçaient leur domination dans les ghettos et les camps (Voir, sur la collaboration des Judenrat avec les nazis le jugement de POLIAKOV, dans son BREVIAIRE DE LA HAINE p.102-103, où il les compare aux "collabos" Laval et Quisling.
En 1941, les dirigeants du groupe STERN (parmi lesquels ITZAC SHAMIR) proposèrent même leur coopération militaire contre les Anglais en Palestine, au nom de la convergence doctrinale sur la pureté des races.
En 1944 enfin, EICHMANN proposa des échanges aux représentants officiels du mouvement sioniste, BRAND et KASTNER, notamment d'échanger un million de juifs contre 10.000 camions (qui ne serviraient que sur le front de l'Est). Après la guerre, des israéliens indignés exigèrent que KASTNER déclarât: "Je ne fais pas cette déclaration en mon nom seulement, mais aussi en celui de l'Agence juive et du Congrès juif mondial." Or les chefs sionistes de ces organismes étaient nombreux dans le Ministère israélien de l'époque. KASTNER fut, très opportunément, assassiné sur les marches du Palais de Justice. (Sur cette politique sioniste sous HITLER: voir le livre de TOM SEGUEV, LE SEPTIEME MILLION, Ed. Liana Levi. Paris 1993 .Il en est de même pour l'influence des sionistes en Amérique où sur 6 millions de juifs, à peine 60.000 (1 %) appartiennent à des organisations sionistes malgré l'énorme influence du "lobby" de l'AIPAC (American Israeli Public Affairs Committee) dont le budget est passé de 1.600.000 dollars en 1982 à 6.900.000 en 1988.
En France, M THEO KLEIN, ancien Président du CRIF, considère qu'il faut bien distinguer l'ensemble des juifs de France (650.000 environ) de la minorité organisée de 60 à 100.000 personnes plus ou moins liées aux associations composant le CRIF. (Le Monde du 13 août 1997)
Après avoir clairement distingué la communauté juive du lobby sioniste qui prétend parler en son nom et qui, en Israël, sous des étiquettes diverses conduit la même politique colonialiste et raciste depuis qu'il est au pouvoir, masquée par les mêmes mythes et les mêmes mensonges, il est aisé, aujourd'hui d'énumérer les étapes de la politique sioniste.
Je l'avais fait déjà, en 1986, dans mon livre PALESTINE, TERRE DES MESSAGES DIVINS (Ed. Albatros), mais les menaces du Bétar de casser les vitrines de tous les libraires qui oseraient le mettre en vente, ont empêché cette clarification. En 1998 enfin, un livre du professeur ILAN GRESISHANNER de l'université Bar Ilan, en Israël, a été traduit en français, aux Editions Gallimard sous le titre: LA NOUVELLE HISTOIRE D'ISRAEL. Je puis donc recommander instamment au lecteur de s'y reporter, en énumérant seulement les crimes qu'il révèle et dont la simple évocation m'a valu trois procès et de lourdes condamnations qui, depuis dix ans, m'ont enterré vivant pour délit de démasquer les mythes et les mensonges masquant les crimes d'une maffia.
Pour n'en citer que quelques uns: le PECHE ORIGINEL D'ISRAEL, titre du livre de Dominique VIDAL, publié aux Editions Ouvrières en 1998, résumant les travaux des nouveaux historiens israéliens qui, sur la base des documents officiels partiellement ouverts au public, font la démonstration irrécusable, contre les mensonges de BEN GOURION et de la maffia de ses successeurs, dévoile le crime d'"épuration ethnique" des dirigeants sionistes. Alors que BEN GOURIN déclarait: "Israël n'a jamais expulsé un Arabe", l'historien israélien BENNY MORRIS, dans ses livres: THE BIRTH OF THE PALESTINIAN REFUGEES (Ed. Cambridge University Press, 1987) et AFTER ISRAEL AND THE PALESTINIANS (Clarendon Press. Oxford, 1990) sur la base des archives israéliennes, après un demi-siècle de mensonges, met au jour les ordres donnés aux chefs militaires israéliens pour expulser par la force les autochtones non-juifs: 800.000 Arabes furent ainsi expulsés par l'armée entre le plan de partage du 29 novembre 1947 et la fin de la première guerre le 20 juillet 1949. (Chiffres de l'Unrwa, Office des Nations Unies pour les réfugiés)
Joseph WEITZ, directeur du Département de la terre au Fonds national juif écrit, le 31 mars 1948: "La guerre du Yichouv (première installation juive en Palestine) a pour objectif d'expulser autant d'Arabes que possible de nos régions." (Ilam PAPPE: THE MAKING OF THE ARAB-ISRAEL CONFLICT", Ed. Tauris. Londres, 1992)
Il ajoute le 18 avril: "J'ai dressé une liste de villages arabes dont je pense qu'ils doivent être nettoyés afin d'homogénéiser les zones juives."
De fait, depuis l'ouverture des archives, l'historien BENNY MORRIS a établi que 418 villages palestiniens sur 475 on été détruits. La "terre promise" de la légende était la "terre conquise" de l'histoire.
ILAN GREILSHANNER donne une version non mystifiée de ce qu'il appelle "le mythe de la guerre des Six jours" (p.334). Mythe d'abord parce qu'à aucun moment l'existence de l'état d'Israël n'a été mise en péril comme l'ont reconnu tous les chefs militaires de l'époque, à commencer par RABIN, alors général. Mythe parce que cette "victoire" avait commencé par une félonie, véritable "Pearl Harbour": l'aviation israélienne, le 5 juin 1967 à l'aube, avant toute déclaration de guerre avait détruit au sol l'aviation égyptienne, comme les Japonais l'avaient fait pour la flotte américaine à PEARL HARBOR.
Ce parjure avait, au cours de ces 6 jours, été accompagné de bien d'autres; sous prétexte de "sécurité d'Israël" ("Mythe de DAVID et de GOLIATH", dit encore ILAN GREILSHAMMER, p.335), le Golan syrien était occupé alors que MOSHE DAYAN lui-même (alors Ministre de la guerre) reconnaissait dans une lettre aujourd'hui authentifiée par sa fille (députée à la Knesset) qu'il s'agissait de satisfaire les convoitises des colons sur la terre du Golan syrien. Ce même MOSHE DAYAN, faisait occuper le Sud du Liban (jusqu'au fleuve Litani) comme s'il s'agissait d'assurer la "sécurité", alors que, depuis des années, il proposait de corrompre n'importe quel officier libanais pour s'en servir comme marionnette d'Israël en le présentant comme "défenseur des chrétiens". (Journal de MOSHE SHARRET. 28 juin 1954)
Jérusalem fut alors envahi au napalm, et annexée comme "capitale éternelle d'Israël", sans se préoccuper de la condamnation unanime des Nations Unies (y compris des Etats-Unis) qui, il est vrai, ne proposèrent aucune sanction contre cette annexion comme ils le feront pour le Koweit (Jérusalem n'est qu'une "ville sainte" alors que le Koweit est mille fois saint puisqu'il est entouré de puits de pétrole.)
Une fois de plus, la religion fut instrumentalisée au profit de la politique. Pendant la deuxième guerre mondiale, les sionistes s'étaient totalement désintéressés du sort des juifs persécutés par les nazis. "Le désastre qu'affronte le judaïsme européen n'est pas mon affaire", disait BEN GOURION, uniquement préoccupé par la préparation d'un état fort en Palestine (TON SEGUEV, op. cit. p.122).
Les mêmes sionistes, voulurent, après coup, exploiter les massacres de juifs pour le présenter comme les seules victimes d'une guerre qui avait coûté 50 millions de morts.
Ils exigèrent pour les morts juifs une sacralisation. Ils utilisèrent l'expression théologique d'"holocauste", comme si seul leur calvaire s'inscrivait dans les desseins de DIEU, les autres massacrés de camps n'étant que des morts de deuxième classe. Cet "apartheid" de morts n'était qu'un corollaire de la notion de "peuple élu", qui a servi à "justifier" tous les colonialismes.
De même les rabbins fanatiques célébrèrent le viol de Jérusalem comme un événement messianique, accomplissement de promesses divines.
En 1982, une nouvelle guerre fut déclarée au Liban par les dirigeants israéliens à partir de nouveaux mensonges: d'abord sur le déclenchement, dont le prétexte fut un attentat contre un diplomate israélien: il fut aussitôt imputé à l'OLP, alors que Madame THATCHER elle-même apportait à la Chambre de Communes la preuve que la prochaine cible de l'agresseur était le dirigeant de l'OLP à Londres (International Herald Tribune du 8 juin 1982).
Le déroulement de l'invasion du Liban par ARIEL SHARON reposait sur d'autres mensonges: il déclarait, au départ, assurer la "sécurité d'Israël" par une avancée de 40 km. En fait, il alla jusqu'à Beyrouth, faisant avec une armada gigantesque, 20.000 morts et, couronnant ces turpitudes, en aidant les tueurs phalangistes de Sabra et Chatila à perpétuer leurs égorgements. Ce criminel de guerre est devenu, depuis lors, Ministre.
Nous pourrions poursuivre la liste de ces forfaits officiels.
Lorsque les Palestiniens n'eurent plus que les veilles pierres de leur patrie pour lutter pour leur dignité par l'Intifada, contre une armée israélienne armée jusqu'aux dents, il y eut, pour une dizaine de soldats israéliens blessés, plus de 1.000 civils assassinés par l'armée de répression.
Là encore avec des "justifications" qui se voulaient divines, au nom de l'exceptionnalité des souffrances du "peuple élu" dans les camps de déportation nazis. Déjà en 1969, ABRAHAM HERSCHELL (ISRAEL, AN ECHO OF ETERNITY, Ed. Doubleday. New York, 1969) écrivait: "L'Etat d'Israël c'est la réponse de DIEU à Auschwitz".
Avec une telle investiture divine l'on pouvait, comme autrefois les hitlériens, appeler "terrorisme" toute "résistance" à la race élue.
Lorsqu'au Liban un soldat de l'armée d'occupation est abattu par un résistant, c'est (comme autrefois le Maréchal KEITEL à Chateaubriand après l'attentat contre un officier allemand: 100 otages fusillés pour un soldat allemand tué) le massacre de 100 civils réfugiés à Cana.
Ce BREVIAIRE DE LA HAINE est au principe de l'éducation des enfants en Israël. Comme l'écrit le Professeur ZIMMERMAN, de l'Université hébraïque de Jérusalem: "Il est de bon ton de dire que l'`Holocauste' est la justification d'Israël Il y a un secteur de la population juive que je définis sans hésiter comme une copie des nazis allemands. Regardez les enfants de colons juifs d'Hébron, ils ressemblent exactement à la jeunesse hitlérienne." (Yeroushalayin du 26 avril 1995)
Ce mépris de l'autre est propagé par les sionistes à l'étranger: pour l'Américain JONATAN GOLDHAGEN, dans son livre: LES BOURREAUX VOLONTAIRES D'HITLER, c'est tout le peuple allemand qui est un peuple de "tueurs".
En France, Bernard-Henri LEVY ose dire, dans son livre L'IDEOLOGIE FRANÇAISE, qu'il s'agisse de VOLTAIRE, de PEGUY, ou même de Bernard LAZARE, que s'est constitué un "fascisme à la française".
"C'est, écrit-il (p.6), toute la culture française qui témoigne de notre antiquité dans l'abjection et qui fait de la France `la patrie du national-socialisme'". (p.123) "Cette France, ajoute-t-il, je sais son visage d'ordure, la ménagerie de monstres qui y habitent." (p.293).
Mais ce BREVIAIRE DE LA HAINE, que les sionistes répandent en Israël et dans le monde, serait trop long à décliner; nous nous contenterons de rappeler qu'ils s'inscrivent dans le programme de domination mondiale des Etats-Unis qui financent et arment toutes ces agressions. Lors de l'invasion du Liban, sur 567 avions dont disposait Israël, 457 venaient des Etats-Unis, grâce aux dons, subventions et "prêts" décrochés à Washington par le lobby israélien (AIPAC).
Le programme de HERZL (constituer un bastion de la civilisation occidentale contre la barbarie de l'Orient) s'insère exactement dans les plans stratégiques de HUNTINGTON sur le CHOC DES CIVILISATIONS, traçant une " ligne de front" pour les guerres futures entre l'alliance "judéo-chrétienne" et la "collusion islamo-confucéenne".
Après avoir commencé leur histoire, comme celle d'Israël, par une "purification ethnique" à l'égard des indiens autochtones, ils ont fait de l'Amérique latine entière une semi-colonie, toujours en tant que "peuple élu": envahissant le Mexique, le Président TAFT disait déjà: "Je dois protéger notre peuple et ses propriétés au Mexique, jusqu'à ce que le gouvernement mexicain comprenne qu'il y a un DIEU en Israël et que c'est un devoir de lui obéir."
Puis ils ont étendu leurs ambitions en Asie, de l'invasion des Philippines à Hiroshima, au Viêt-nam, en Irak (cette fois sous l'impulsion du "lobby israélien" comme l'a souligné Alain PEYREFITTE dans le Figaro du 5 novembre 1990.)
Maintenant c'est au tour de l'Europe: les Etats-Unis sont venus deux fois au secours de la victoire, en débarquant une première fois en 1917, une deuxième fois en 1944, lorsque l'armée allemande avait perdu toute chance de victoire, après Verdun et après Stalingrad.
Aujourd'hui le danger d'une troisième guerre mondiale dont Israël peut être le détonateur, vient de cette communauté de destin expansionniste. MOSHE DAYAN évoquait déjà l'exemple américain: "Prenez la Déclaration américaine de l'indépendance. Elle ne contient aucune mention de limites territoriales. Nous ne sommes pas obligés de fixer les limites de l'Etat." (Jérusalem Post, du 10 août 1967).
Le mythe du "grand Israël" ne comporte pas seulement un projet de désintégration de tous les Etats arabes "de l'Euphrate au Nil" (Revue Kivounin-Orientations publié par L'Organisation sioniste mondiale à Jérusalem en février 1942 n· 14)
La pression de l'arme nucléaire (dont l'Etat d'Israël refuse tout contrôle par l'Agence internationale de l'énergie atomique), ouvre des perspectives plus vastes. Le journal Ha'aretz du 29 juin 1975 écrivait déjà: "un nombre suffisant de bombes atomiques pourrait causer des dommages énormes dans toutes les capitales, et provoquer l'effondrement du barrage d'Assoun. Avec une quantité supplémentaire nous pourrions toucher les villes moyennes et les installations pétrolières", puis il évoque, dans le monde arabe, "la destruction d'une centaine de cibles."
L'Etat d'Israël n'est donc plus seulement, selon le rêve de HERZL, le mandataire d'un colonialisme collectif au Moyen Orient; il est devenu, dans la stratégie américaine de domination mondiale, une pièce majeure dans le rapport des forces à l'échelle planétaire. 

LA PALESTINE: Résolutions des Nations Unies
par Edgard André

Le 27 mai 1999, des heurts violents ont eu lieu à Jérusalem Est occupée, lors d'une manifestation contre la construction d'une colonie juive dans le quartier arabe de Ras el-Amoud, au flanc du Mont des Oliviers, quartier habité par quelque 30.000 Arabes (1).Voilà donc ? parmi d'autres, un nouvel indice qui amène à s'interroger, malgré le mémorandum de Wye River, sur la possibilité d'avancées au Moyen-Orient. Aucun redéploiement militaire en Cisjordanie, pourtant prévu à Wye Plantation, ne s'est produit; le blocage israélien persiste. Les frappes anti-irakiennes, au mépris des Nations Unies, se poursuivent, sans parler de la guerre illégale des Balkans, qui, pour humanitaire qu'elle se prétende, continue à entraîner beaucoup de misère, de destruction et de souffrance, sinon de contamination radioactive (2). On se demande quand Israël et la Palestine parviendront enfin à s'entendre et à vivre en paix au Proche Orient.
Le représentant, à Bruxelles, de l'Organisation de la libération de la Palestine, l'avait expliqué, lors d'une conférence récente à l'Université de Mons-Hainaut (Belgique): malgré toutes les concessions palestino-arabes qui ont été faites depuis la fondation de l'Etat d'Israël en 1948, les exigences israéliennes demeurent exorbitantes. A Wye Plantation (23 octobre 1998) par exemple, l'Autorité Nationale Palestinienne (A.N.P.) a dû réviser à la baisse ses revendications et s'aligner sur la position américaine très minimaliste. Ceci est confirmé par l'Israélien Meiron Benvenisti (3). Cette rencontre au sommet n'était nécessaire que pour forcer le gouvernement israélien à remplir les engagements contractés à Oslo, en 1993. Quant aux Palestiniens, ils ne sont venus qu'avec des revendications et des réclamations dans des domaines élémentaires qui affectent la vie de deux millions d'êtres humains: liberté de mouvement, libération des prisonniers, ouverture d'une lucarne sur le monde extérieur, arrêt du vol des terres, limitation au développement des colonies et renoncement aux actions unilatérales. Pourtant les discussions n'ont tourné qu'autour de la "recherche d'un compromis entre ces revendications élémentaires et les exigences tordues qu'avancent les Israéliens pour se soustraire à leurs engagements". Il s'agit donc bien de nouvelles concessions palestiniennes.
Par contre, les exigences sécuritaires d'Israël ont été rencontrées. Yasser Arafat devra proposer aux Israéliens un plan de lutte contre le terrorisme, leur soumettre la liste nominative des membres des Forces de police de l'A.N.P. et réduire leurs effectifs de 36.000 à 24.000 hommes. Il s'est même ridiculement prêté à l'exigence israélienne de reconvoquer le Conseil national palestinien pour réaffirmer l'abrogation des articles anti-sionistes de la Charte nationale palestinienne alors que ceux-ci avaient été rendus caducs en 1988 et définitivement abrogés en mars 1996. Pour éviter de "provoquer" les Israéliens, la censure palestinienne sera tenue de sévir jusque dans la musique, la chanson, la télévision, la presse. Enfin, l'A.N.P a signé un document prévoyant la libération de 2.000 prisonniers palestiniens, mais qui oubliait de préciser qu'il s'agissait de prisonniers politiques, ce qui allait sans doute de soi. Cet oubli a été mis à profit par les autorités israéliennes qui ont libéré une majorité de prisonniers de droit commun. En d'autres mots, l'A.N.P, à Wye River, s'est fait piéger et tourner en ridicule.
Autres éléments inattendus de ces négociations: les retraits israéliens n'ont pas été précisés sur cartes et les "colonies de peuplement" vont être davantage "protégées". L'aide américaine aux Israéliens s'élèvera à 1,2 milliard, tandis que les Palestiniens, dont l'économie a été fortement lésée par le blocage fréquent des territoires occupés et par les nouvelles confiscations de terres (10% de la Cisjordanie), ne recevra qu'une aide américaine annuelle de 300 millions de dollars. Toutes ces dispositions du mémorandum de Wye montrent clairement, outre la partialité habituelle des Américains, l'extrême soumission que manifestent beaucoup trop souvent les autorités palestiniennes actuelles.
Malgré ces perspectives favorables pour Israël, le cabinet Netanyahou ne s'est pas entendu pour ratifier l'accord et s'est vu obligé de décider d'organiser des élections anticipées. Elles ont eu lieu le 17 mai dernier, date jusqu'à laquelle l'accord de Wye a été gelé.
Il est très souhaitable que le prochain gouvernement Israélien, qui sera dirigé par un travailliste, adopte une politique plus pacifique et plus respectueuse des droits du peuple palestinien. Certes, des dossiers très ardus restent à régler. Celui de millions de réfugiés qui réclament le "droit de retour" inclus dans des résolutions de l'Assemblée générale des Nations-Unies. En plus, Jérusalem reste pomme de discorde: Israël poursuit dans la ville sainte de trois religions, une politique de colonisation et d'expulsion de ses habitants arabes. L'eau, qui est rare dans cette région, reste une ressource disputée. Dès lors, la question se pose: la communauté internationale parviendra-t-elle à aider le Proche Orient à sortir de l'impasse?
Dans ce contexte difficile et lourd de dangers, il est utile de rappeler les résolutions les plus significatives, prises par l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité de l'O.N.U.(4).
Depuis 1947, les différentes instances chargées de dire et faire appliquer le droit ont promulgué plus de deux cents résolutions qui sont toutes, ou presque, restées lettre morte; Israël n'a respecté ni appliqué aucune d'entre elles. Elles existent pourtant et il est intéressant d'en rappeler les plus importantes et d'en commenter quelques-unes.
La résolution 181 de l'Assemblée générale, le 29 novembre 1947, "recommande" (et non "décide") le partage de la Palestine en deux Etats, l'un juif, l'autre arabe. A ce moment là, aux 650.000 juifs qui n'occupent que 6% de territoire, l'O.N.U. donne plus de la moitié du territoire de la Palestine. A Tel Aviv, les Juifs dansent de joie, mais les Palestiniens pleurent la "Nekba", la catastrophe. Un de leurs journaux écrit que "la Palestine a été bradée à la foire internationale des maquignons". La Palestine, en effet, n'était pas une terre sans peuple prête à accueillir "un peuple sans terre". La Palestine était en fait habitée par un demi-million d'Arabes autochtones, quoi qu'en ait dit en 1972 Madame Golda Meir, premier ministre de l'Etat d'Israël. Elle déclarait en 1972: "Il n'y a pas, il n'y a jamais eu de peuple palestinien". Par ce mensonge, elle s'efforçait de nier l'existence d'un peuple et de fournir une justification à la domination israélienne sur le territoire.
Ce qui est déconcertant dans cette question du partage du territoire de la Palestine en 1948, c'est que, juridiquement, "le titulaire de la souveraineté sur le territoire de l'ancienne Palestine mandataire britannique reste le peuple palestinien, car à aucun moment il n'a perdu son titre. (---). Le peuple palestinien garde intégralement son titre entre ses mains car ni les termes de la Société des Nations (S.D.N.), ni ceux de la résolution 181 des Nations Unies n'ont conduit à le lui faire perdre" (5). Juridiquement, même si les Palestiniens doivent aujourd'hui, pour des raisons de "facteurs d'effectivité" (notamment les 50 ans de l'histoire d'Israël) céder une partie de leur territoire (définie par l'Assemblée générale de l'ONU), le transfert du titre territorial n'a pas eu lieu et reste donc entre les mains du peuple palestinien. Celui-ci garde un "titre de propriété inaliénable sur la terre". Dans la négociation, il faudrait donc "insister sur les conditions d'une clarification au regard du droit international et, inversant la problématique, rappeler à Israël qu'il est en position de demandeur". Ce qui implique une réelle sécularisation du droit international, c'est-à-dire que les Israéliens doivent renoncer à l'orgueil théocratique qui les pousse à croire que leur terre leur aurait été donnée par Dieu. Le renoncement à ce concept devrait permettre une issue favorable aux négociations de paix.
La résolution 194 de l'Assemblée générale des Nations Unies, le 11 décembre 1948, affirme le droit des "réfugiés qui le désirent de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible", ou, à défaut, à "des indemnités à titre de compensation". Entre 1949 et 1967, vingt résolutions de l'Assemblée générale ont rappelé ces deux droits.
Selon les "nouveaux historiens israéliens", il apparaît de plus en plus évident que les Palestiniens ont fui à cause d'une stratégie globale d'expulsion. En 1948, quelque 700.000 Palestiniens ont été expulsés de leur territoire par les forces israéliennes. Ils sont à présent 4 millions en exil. Environ cent vingt mille autres (un million aujourd'hui) sont restés sur place et sont devenus citoyens israéliens de seconde zone. Deux millions et demi de Palestiniens vivent en Cisjordanie et dans la bande de Gaza sans aucune souveraineté sur ces terres.(6) Le peuple palestinien a été victime d'une vaste entreprise d'expulsion et d'expropriation. Plus de 60% d'entre eux vivent en exil. La résolution 194 de l'ONU leur donne droit au retour...
Troisième résolution importante, celle du Conseil de Sécurité, qui porte le numéro 242 et qui date du 22 novembre 1967, six mois après la guerre des "Six Jours", "souligne l'inadmissibilité de l'acquisition "de ou "des" territoires par la guerre"; Elle reconnaît le droit à l'existence et à la sécurité de l'Etat d'Israël, mais demande aussi "le retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés".
Le texte contient une ambiguïté et Israël ne manquera pas de l'utiliser à son propre avantage. Le texte anglais inclut les mots suivants "withdrawal..from territories occupied" sans article devant "territories" et se traduira par "retrait de territoires occupés". Pour Israël, le retrait du Sinaï lui a paru suffire pour se conformer à la résolution de l'ONU, mais il oubliait de toute manière que cette résolution 242 condamne l'acquisition "de" ou "des" territoires par la guerre.
La résolution 2442 de l'Assemblée générale, le 19 décembre 1968, s'inquiète de la "violation des Droits de l'homme dans les territoires occupés par Israël". Cette violation sera dénoncée plus tard à plusieurs reprises.
Après 1967, en Cisjordanie et à Gaza, se sont succédé détentions administratives, expropriations de masse, démolitions de maisons, tortures, assassinats, fermetures d'écoles et d'universités, censures éditoriales. Les implantations illégales de "colonies de peuplement" se poursuivent, alors que l'occupant refusait aux Palestiniens le permis de bâtir sur des terrains leur appartenant en Cisjordanie. Il en est résulté que les zones palestiniennes sont devenues des Bantoustans contrôlés de l'extérieur par Israël; la carte actuelle de la Cisjordanie est éloquente à ce sujet.
Encore récemment, dans son mensuel de mai 1999 intitulé "Libertés", Amnesty International dénonçait devant la Commission des droits de l'homme des Nations Unies le fait "que le gouvernement israélien ignorait totalement les recommandations des organes de l'ONU. Seize cents Palestiniens sont encore arrêtés chaque année. Au cours des interrogatoires, les prisonniers sont systématiquement torturés ou maltraités. A.I. "appelle la Commission à demander au gouvernement israélien de mettre fin à ces atteintes aux droits humains et de respecter dans les territoires occupés les traités des Nations Unies relatifs aux droits humains ainsi que la quatrième Convention de Genève (1949)".
La résolution 2535 B de l'Assemblée générale du 10 décembre 1969, affirme pour la première fois les "droits inaliénables du peuple palestinien". Ces droits comprennent, au minimum, le droit de ce peuple à être reconnu comme peuple, son droit à un territoire, le droit au retour, et les droits de l'homme.
La résolution 2628, le 4 novembre 1970, proclame que "le respect des droits palestiniens est un élément indispensable dans l'établissement d'une paix juste et durable".
La résolution 2649 de l'Assemblée générale, le 8 décembre 1970, se rapporte au "droit à l'autodétermination du peuple palestinien". Le terme "autodétermination" se prête à plusieurs interprétations. Celle qui s'applique ici est la plus connue et a présidé à la décolonisation. Les peuples sous domination étrangère, entre autres, sont titulaires de ce droit entendu comme un droit à l'indépendance. Un critère supplémentaire: "seuls les peuples inscrits sur "la liste des territoires non autonomes" à l'ONU bénéficient du droit à disposer d'eux-mêmes".(7).
La résolution 2672 de l'Assemblée générale, le 8 décembre 1970, considère comme nuls et non avenus les "changements opérés par Israël dans les territoires occupés".
La résolution 32/5 de l'Assemblée générale, le 28 octobre 1977, stipule que "toutes les mesures et les décisions prises par le gouvernement israélien. en vue de modifier le statut géographique et la composition démographique dans les territoires palestiniens et autres territoires arabes occupés depuis 1967, n'ont pas de validité juridique et constituent une grave obstruction aux efforts de paix".
La résolution 3236 de l'Assemblée générale, le 22 novembre 1974, reconnaît "le droit à la souveraineté et à l'indépendance nationale du peuple palestinien". Cette résolution sera souvent qualifiée de "Charte des droits du peuple palestinien".
La résolution 605 du Conseil de Sécurité, le 22 décembre 1987 "déplore vivement ces politiques et pratiques d'Israël, puissance occupante, qui violent les droits de l'homme du peuple palestinien dans les territoires occupés".
La résolution 3237 de l'Assemblée générale, le 22 novembre 1974, déclare que l'Organisation de la libération de la Palestine (O.L.P.) est désormais "invitée à participer aux séances et aux travaux de l'Assemblée générale en qualité d'observateur"
La résolution 3379 de l'Assemblée générale, le 10 novembre 1975, assimile le sionisme à une forme de racisme. C'est le sionisme, et non la foi juive, qui est dénoncé par Roger Garaudy dans son livre sur "Les Mythes fondateurs de la politique israélienne". Le sionisme est une doctrine politique fondée par Théodor Herzl. C'est aussi une doctrine nationaliste née non pas du judaïsme mais du nationalisme européen du XIXe siècle; Th. Herzl se déclarait lui-même agnostique et n'obéissait pas à une impulsion religieuse. Le sionisme est aussi une doctrine coloniale. Th. Herzl voulait réaliser, d'abord, une "compagnie à charte" "sous la protection de l'Angleterre ou d'une autre puissance, en attendant d'en faire l'Etat juif". C'est cette doctrine politique, nationaliste et coloniale, que Th. Herzl fit triompher au Congrès de Bâle, en août 1897. Pendant toute sa vie et jusqu'à sa mort en Israël, "l'une des plus grandes voix juives de ce siècle", Martin Buber n'a cessé de "dénoncer la dégénérescence et même l'inversion du sionisme religieux en sionisme politique. "En lutte contre la foi juive prophétique, le sionisme politique, comme tout nationalisme, est fondé sur "le refus de l'autre et la sacralisation de soi".
En 1966, Golda Meir proclamait comme une profession de foi: "Ce pays existe comme accomplissement d'une promesse faite par Dieu lui-même". Le sionisme politique revendique un Etat juif en brandissant la Torah comme titre de propriété signé "Dieu". L'Etat d'Israël à ce niveau de transcendance absolue, suit une logique de sacralisation, semblable à celle où les chrétiens seraient encore tenus de croire aujourd'hui que le soleil tourne autour de la terre, en se référant à une interprétation abusive de la Bible présentée comme sacrée et intouchable.(8).
Les sionistes prétendent aussi avoir un droit historique imprescriptible de s'installer sur la terre de Palestine, "parce que leurs ancêtres l'ont occupée bien avant notre ère. Mais ils oublient que bien avant eux la terre de Canaan a été occupée par des populations diverses et multiples et qu'ils n'y ont constitué un royaume et que pendant une période relativement courte et qu'au delà, le territoire a été occupé par cinq empires successifs. De plus, ils semblent n'accorder aucune importance à ce qui s'est passé au Proche Orient pendant mille neuf cents ans, entre la disparition de toute structure étatique juive en Terre sainte et la fondation de l'Etat d'Israël en 1948" (9).
"La résolution 3161 de l'Assemblée générale le 9 décembre 1976, en appelle à "la Conférence de Paix sur le Moyen-Orient avec la participation de l'O.L.P."
La résolution 3465 de l'Assemblée générale, le 29 novembre 1997, concerne les accords de Camp David auxquels elle reproche d'être conclus "hors du cadre de Nations Unies et sans la participation de l'O.L.P., qui représente le peuple palestiniens"; elle "condamne tous les accords partiels et séparés qui constituent une violation flagrante des droits du peuple palestinien, des principes de la Charte des Nations unies et des résolutions adoptées concernant la question palestinienne".
L'Assemblée générale des Nations Unies a conclu sa session de décembre 1988 à Genève en exigeant "l'ouverture immédiate des travaux pour la tenue d'une conférence internationale".
Pour les années 1991-1999, un tableau paru dans "Le Monde Diplomatique" d'avril 1999 apporte des informations utiles sur les événements qui se sont succédé pendant cette période. Il est intitulé "De Madrid à Wye Plantation".
Le 4 mai 1999 marque donc la fin de la période d'autonomie palestinienne. C'est alors qu'aurait dû être (re)proclamé l'Etat de Palestine. A ce sujet, il est utile de distinguer l'aspect juridique et la dimension politique.(10)
L'aspect juridique
Du point de vue du droit international, le dossier de l'Etat Palestinien est inattaquable. L'Etat palestinien existe en droit, en tant qu'expression politique de la souveraineté inaliénable du peuple palestinien sur le territoire de la Palestine. Il existe également en fait depuis que la S.D.N. a confié à la Grande-Bretagne un mandat spécifique sur la Palestine en tant qu'entité distincte (voir ci-dessus les commentaires à propos de la résolution 181, novembre 1947). Mais en outre, le 15 novembre 1988, à Alger, a eu lieu la Déclaration d'indépendance de l'Etat palestinien, celui-ci étant formellement et officiellement reconnu par 130 Etats membres de l'ONU.
"L'Etat palestinien résulte aussi de l'esprit et de la lettre de la Charte de l'ONU, de la Déclaration universelle des droits de l'homme, ainsi que d'innombrables chartes, conventions et résolutions internationales" (p.6).
En plus, toujours d'un point de vue juridique, "la souveraineté de l'Etat palestinien est automatiquement auto-restaurée lorsque les accords qui le suspendaient pour cinq ans parviennent à échéance" (p.7)
La dimension politique
Du côté palestinien, en résumé, existent deux camps séparés par un "hiatus béant".
D'une part, la volonté populaire, optimiste, espère qu'une déclaration solennelle d'indépendance concrétiserait une véritable souveraineté des Palestiniens sur leur territoire. Cet espoir est cependant mêlé à la crainte de mesures de rétorsion auxquelles aurait recours l'occupant israélien, en cas d'autoproclamation unilatérale de souveraineté.
D'autre part, le camp des sceptiques, pessimiste, surtout composé d'intellectuels (parmi lesquels Edward Saïd), souhaite le renversement de la direction actuelle de l'OLP contestée aussi, entre autres, par Hanane Ashrawi, militante pour les droits de l'homme (11), et fait valoir qu'une déclaration d'indépendance serait stérile et démagogique, vu le morcellement actuel du territoire palestinien "en une myriade d'enclaves semi-autonomes et sans libre liaison entre elles, quadrillé par les routes, les colonies et les camps militaires de l'occupant".
En tout cas, du côté israélien, les grandes formations politiques, même les travaillistes, s'opposent unanimement à une proclamation unilatérale. Le Likoud, lui, dirigé ad intérim par le faucon Sharon, va jusqu'à refuser l'Etat palestinien et ferait même de la déclaration d'indépendance un "casus belli", parce qu'elle indiquerait "l'insoumission palestinienne à la loi du plus fort", ce qui représente à ses yeux une déclaration de guerre ! Même si nombre de personnalités de droite sont convaincues que "l'Etat palestinien est une réalité-en-route certes regrettable, mais néanmoins inévitable".
Il faut donc attendre la formation du gouvernement Barak, voir le contenu de son programme et le début de sa mise en oeuvre. Mais la situation reste lourde de violence, la violence du désespoir qui se nourrit de l'asphyxie économique et de l'impasse politique. En outre, en Israël même, M. Barak aura fort à faire pour combler le fossé qui s'élargit entre les citoyens laïques et religieux. Il est temps cependant que M. Barak agisse sur base des propositions de Wye River gelées par Netanyahou. Qu'il montre sa bonne foi, entre autres, sur le gel des colonies de peuplement et la libération des prisonniers. Des obstacles seront à surmonter, mais il faudra que son gouvernement soit en mesure de progresser, avec les Palestiniens, dans la voie d'une véritable paix dans la région. Véritable et juste !
NOTES
1) Le Matin, quotidien belge, 28 mai 1999.
2) Le 5 juin 1999: un processus de paix semble avoir commencé dans les Balkans.
3) "Revue Nouvelle", Bruxelles, p. 16, mai-juin 1999.
4) Sources: "Le Dossier Palestine" et A. Monmon, Israël, Palestine (voir bibliographie)
5) M. Chemiller-Gendreau, professeur à l'Université Paris-VII-Denis Diderot, in "Revue d'Etudes Palestiniennes", No 18, p. 9 et 10; et aussi in "Le Monde diplomatique", avril 1999, p. 12.
6) Voir "Signes des temps", Pax Christi, Bruxelles, No 3, septembre 1998: le texte d'A. Monmon.
7) B. Delcourt, "Qui bénéficie du droit à l'autodétermination?", in M. Collon, Poker Menteur, éd. EPOn 1998, p. 374.
8) Voit note 6.
9) Voir note 6.
10) Voir la Revue d'Etudes Palestiniennes, No 19, 1999, notamment le texte de Ilan Halévi.
11) Voir "Le Matin", 27 mai 1999, p. 17.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
-- Ligue internationale pour le droit et la libération des peuples, Le dossier Palestine, La question palestinienne et le droit international, Ed. La Découverte / documents, Paris, 1991.
-- A. Monnom, Israël - Palestine, de la Bible à l'imbroglio actuel, Ed. La Lucarne, Tournai 1991.
-- La Revue Nouvelle, numéro 5-6, mai - juin 1998, et mai - juin 1999, 1050 Bruxelles
-- Signes des Temps, revue de Pax Christi, Wallonie - Bruxelles, n·3, septembre 1998, Ed. M. Ansay,1050 Bruxelles.
-- Roger Garaudy, Les mythes fondateurs de la politique israélienne, Ed. Samiszdat, 1996 .
--. Revue d'Etudes Palestiniennes, n· 18 et 19, Paris, 1998-1999.
-- Le Monde Diplomatique, avril 1999, Paris.
-- Libertés, Mensuel d'Amnesty International, 1060 Bruxelles, mai 1999.
-- Michel Collon, Poker Menteur. Les grandes puissances, la Yougoslavie et les prochaines guerres, Ed. EPO, Bruxelles, 1998. 


LE VIOL DE JERUSALEM


par Isabelle Coutant Peyre
 
Aborder le sujet de Jérusalem, Al Quds, la Sainte, commune aux trois grandes religions monothéistes, renvoie d'un côté, aux racines symboliques profondes de la majeure partie de l'humanité, de l'autre, à une sale guerre coloniale et raciste.
Est-il explicable que l'Etat d'Israël s'approprie de facto Jérusalem, Ville Sainte des religions abrahamiques, en violation des accords internationaux et des résolutions des Nations Unies, sans que les protestations ne dépassent le langage feutré de la diplomatie ?
Lorsqu'en 1991 l'Irak a voulu reprendre possession des territoires du Koweït que la puissance coloniale britannique lui avait confisqués en 1899, les Etats-Unis et leurs vassaux ont immédiatement décidé de détruire ce pays et son peuple.
C'est un génocide, qui dure depuis huit ans, avec l'autorisation du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Les protestations ne sortent pas du cercle des militants "anti impérialistes".
Madame Louise Arbour, procureur du Tribunal pénal international spécial, qui s'est empressée d'inculper un chef d'Etat en exercice parce qu'il déplait aux Etats-Unis, Slodoban Milosevic, en pleine période de guerre, et en violation de toutes les règles du droit de la guerre, a-t-elle jamais posé la moindre question sur la légitimité d'un génocide scientifiquement organisé et qui se poursuit sans interruption depuis huit années ?
Evidemment non, puisque le véritable motif en est le contrôle des ressources pétrolières, et la protection d'Israël, tête de pont de l'occident américanisé au Proche-Orient.
Le contrôle économique et financier d'une humanité qui n'est plus que marchandise matérielle, voilà la seule cause sacrée qui légitime les bombes et les génocides aux yeux du maître américain et de ses domestiques.
Alors comment la situation de Jérusalem, qui est pourtant le symbole des racines spirituelles de cette même humanité, pourrait-elle constituer un casus belli aux yeux des intérêts américains ?
Et pourtant, que de violations des règles du droit international, y compris celles des Conventions de Genève concernant la protection des civils en temps de guerre.
Quant aux résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies, ou celles du Conseil de Sécurité lorsqu'il y en eu pour condamner Israël dans les seuls cas particulièrement graves les représentants d'Israël n'en ont cure.
A une seule occasion, ils ont officiellement déclaré vouloir s'y conformer, lorsque cette condition fut posée par l'Assemblée générale des Nations Unies pour admettre Israël aux Nations Unies. On sait quel sort fut fait à ces promesses de principe.
La philosophie d'Israël à l'égard des Nations Unies fut résumée par Shimon Pérès, qui déclarait en 1996, à la suite du massacre de Cana (dans un camps de laFinul, 200 civiles libanais furent tués par un bombardement la nuit, le 18 avril 1996), en se référant à David Ben Gourion: "On ne peut faire confiance aux Nations Unies car ce que disent les goyim ne compte pas. Seul importe ce que font les juifs." (déclaration au journal Haaretz)
Dans cet esprit, quel a été le traitement de Jérusalem depuis le 14 mai 1948, le jour où l'Etat d'Israël s'est autoproclamé comme l'Etat juif, au mépris du plan de partage au demeurant plus que critiquable adopté le 29 novembre 1947 par les Nations Unies, sur des territoires dont ses chefs de guerre ont éradiqué toute population impure à leurs yeux ?
Jérusalem, pour laquelle le plan de partage onusien avait fixé un statut international, que l'Etat Hébreu s'est empressé de s'approprier comme capitale privée sur ses quartiers est, pour ensuite ne plus cesser son expansion hégémonique sur toute la ville, en toute impunité.
En 1947 vivait à Jérusalem le peuple palestinien, toutes confessions religieuses confondues.
C'est à Jérusalem que Dieu arrêta le bras d'Abraham, auquel il avait ordonné de sacrifier son fils.
Pour les juifs, les Lieux saints du judaïsme y sont le Site du Temple de David et de Salomon et son Mur des lamentations, les tombeaux du Roi David, d'Absalon et de Rachel.
Pour les chrétiens, c'est la ville de la Passion: C'est là que Jésus a prêché, été arrêté puis crucifié avant de ressusciter. Les Lieux saints chrétiens sont la Basilique du Saint Sépulcre, l'église Sainte-Anne, le tombeau de la Vierge, le Cénacle, Gethsémani, le Golgotha et les lieux de l'Ascension.
Pour les musulmans, Jérusalem, ville des prophètes est la Sainte Al Quds parce que Mohamed a effectué son ascension (mi'râj) du Rocher vers le Ciel. Avec les Mosquées d'Omar, construite autour de ce rocher, et Al Aqsa, c'est la troisième ville sainte de l'Islam après La Mecque et Médine.
Depuis la création de l'Etat d'Israël, les Israéliens n'auront de cesse de s'approprier toute la ville, par proclamations successives de souveraineté politique et administrative, accompagnées de mesures d'expropriations et de confiscations, suivies de la destruction progressive des quartiers arabes et expulsion de leurs habitants, afin d'effacer jusqu'aux traces du souvenir de leur présence.
Cela s'appelle le nettoyage ethnique, empêché ou provoqué à coups de bombardements massifs lorsqu'il s'agit d'une province Yougoslave, mais mollement réprimandé par les Nations Unies, lorsqu'il s'agit des Palestiniens, et largement financé conjointement par le Congrès américain et des intérêts privés.
Quelques extraits chronologiques si révélateurs:
29 novembre 1947: Résolution 181 de l'Assemblée générale des Nations unies qui consacrait le principe du statut international de Jérusalem, sous forme de corpus separatum soumis à un régime international spécial, et sous administration des Nations Unies.
Démilitarisation de la ville, interdiction de toute discrimination raciale ou religieuse, égalité des citoyens et liberté d'aller, venir et de résider, constituaient les principes fondateurs des garanties prévues.
14 mai 1948: Autoproclamation de l'Etat d'Israël fixant sa capitale à Tel-Aviv.
29 mai 1948: résolution 50 du Conseil de Sécurité invitant notamment "tous gouvernements et autorités intéressées à prendre toutes les précautions possibles pour la protection des Lieux saints et de la ville de Jérusalem, et à permettre notamment l'accès à tous les sanctuaires et lieux saints à ceux qui ont le droit reconnu de les visiter pour y pratiquer leur culte."
27 juillet 1948: Le gouvernement de Tel-Aviv annonce que la partie de Jérusalem qu'il contrôle militairement est désormais un "territoire occupé par Israël".
29 juillet 1948: deux jours plus tard, le ministre des affaires étrangères israélien, Moshe Shertok, annonce que son gouvernement n'est pas lié moralement par la décision du 29 novembre 1947, instituant l'internationalisation de Jérusalem.
11 décembre 1948: L'Assemblée générale de l'ONU vote la résolution 194 fixant à nouveau le principe du droit au retour des réfugiés palestiniens dans leur foyer et l'internationalisation de Jérusalem, comprenant la démilitarisation de la ville et la protection des Lieux saints.
20 janvier 1949: Le conseil municipal juif de Jérusalem vote une délibération qui décrète que "Jérusalem demande au monde entier et à l'Etat d'Israël à être annexé pour toujours à cet Etat".
Le soir même, David Ben Gourion déclare que "Les Nations unies et le monde ont perdu la ville et n'ont pas levé un doigt pour la défendre. L'armée d'Israël a conquis et a libéré la ville, nous ne l'abandonnerons pas".
11 mai 1949: L'Assemblée générale des Nations Unies:
"prenant acte de la déclaration par laquelle l'Etat d'Israël "accepte sans réserve aucune, les obligations découlant de la Charte des Nations Unies et s'engage à les observer, du jour où il deviendra Membre des Nations Unies".
"décide qu'Israël est un Etat pacifique qui accepte les obligations de la Charte, qui est capable de remplir lesdites obligations et disposé à le faire"
En conséquence "Décide d'admettre Israël à l'Organisation des Nations Unies".
9 décembre 1949: L'Assemblée générale des Nations Unies adopte un projet d'internationalisation de Jérusalem.
Les autorités israéliennes s'en moquent, et quatre jours après, le 13 décembre 1949, transfèrent le siège du gouvernement et le parlement à Jérusalem.
1er janvier 1950: La Ville Sainte est décrétée capitale de l'Etat d'Israël.
1967: Dès la fin de la "guerre des six jours", l'assemblée israélienne (la Knesset) étend "le droit, l'administration et la juridiction d'Israël" à Jérusalem-Est, et déclare la ville "réunifiée capitale éternelle d'Israël".
Vingt trois ans plus tard:
30 juin 1980: Résolution 476 du Conseil de Sécurité: "Réaffirmant que l'acquisition de "territoire par la force est inadmissible,
"Gardant présent à l'esprit le statut particulier de Jérusalem et, spécialement, la nécessité "de protéger et de préserver la dimension spirituelle et religieuse unique des Lieux saints de "cette ville, ()
"Déplorant qu'Israël persiste à modifier le caractère physique, la composition "démographique, la structure institutionnelle et le statut de la Ville Sainte de Jérusalem.
()
"Confirme à nouveau que toutes les mesures et dispositions législatives et administratives prises par Israël, la Puissance occupante, en vue de modifier le caractère et le statut de la Ville Sainte de Jérusalem, n'ont aucune validité en droit et constituent une violation flagrante de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre et font en outre gravement obstacle à l'instauration d'une paix d'ensemble, juste et durable au Moyen-Orient."
30 juillet 1980: Le résultat de cette belle déclaration de principe ne se fait pas attendre; le parlement israélien adopte une loi fondamentale proclamant: "Jérusalem entière et réunifiée est la capitale de l'Etat d'Israël".
20 août 1980: Résolution 476 du Conseil de Sécurité "Réaffirmant de nouveau que "l'acquisition de territoires par la force est inadmissible,()
" Profondément préoccupé par le fait que le Knesset israélienne a adopté une `loi fondamentale' proclamant une modification du caractère et du statut de la Ville sainte de Jérusalem, avec ce que cela implique pour la paix et la sécurité"
"Notant qu'Israël ne s'est pas conformé à la résolution 476 (du 30 juin précédent), ()
"Décide de ne pas reconnaître la `loi fondamentale' et les autres actions d'Israël qui, du fait de cette loi, cherche à modifier le caractère et le statut de Jérusalem et demande:
"aux Etats qui ont établi des missions diplomatiques à Jérusalem, de retirer ces missions de la Ville sainte."
Ce fut la seule décision du Conseil de Sécurité qui ne resta pas au stade de voeux pieux.
Jamais aucune sanction ne fut prise contre Israël, clone guerrier des intérêts américains et de leurs alliés occidentaux au Proche-Orient, et, bien au contraire, la colonisation et l'épuration ethnique contre les Palestiniens s'est poursuivie et accélérée grâce aux fonds américains.
Quelques exemples recueillis dans l'actualité des deux dernières années montrent la mise en place d'un programme systématique d'appropriation et d'épuration ethnique à Jérusalem, comme dans le reste des territoires occupés par Israël.
Bien que l'annexion de Jérusalem-Est par Israël soit nulle et non avenue pour les Nations Unies, les Israéliens célèbrent chaque année début juin la "réunification" de Jérusalem qui "restera entièrement et pour l'éternité sous la souveraineté d'Israël" (Benyamin Netanyahou cité dans Le Monde du 7 juin 1997).
Pendant ce temps-là les 160 000 résidents palestiniens qui restent à Jérusalem, après que les autres habitants non juifs originaires de la ville, aient tous été expulsés, vivent dans des quartiers surpeuplés, cernés de colonies juives et soumis d'autorité aux lois israéliennes, ne peuvent même plus rentrer chez eux sans permis spéciaux délivrés au compte-gouttes par l'armée, soumis à des retraits arbitraires.
Juillet 1997:Le milliardaire juif américain, Irving Moskovitz, qui demeure à Miami, et qui a acheté de nombreux terrains à Jérusalem-Est dans les années 70, obtient un permis de construire une nouvelle "implantation" juive de 132 logements avec palissade de sécurité de 1,80 mètres pour protéger les futurs habitants de leurs voisins ! Washington proteste mollement.
Août 1997: Israël accélère la démolition de maisons palestiniennes, notamment à Jérusalem-Est. Pendant les trois premières semaines d'août, 32 maisons de palestiniens ont été rasées par l'armée israélienne, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, et leurs habitants expulsés. Ces maisons gênaient des projets immobiliers israéliens.
Juin 1998: Passant outre aux condamnations américaines, européennes et arabes de ses nouveaux desseins expansionnistes pour Jérusalem, le gouvernement israélien entérine "à l'unanimité" l'annexion de toute la couronne de la ville, sous souveraineté unique d'Israël.
Pour le député du Likoud, Reuven Rivlin, l'instauration du "Grand Jérusalem" signifie que "la question de Jérusalem ne sera jamais mise sur la table des négociations".
Dans le même temps, des militants d'Ateret Cohanim, qui occupent une vingtaine de maisons palestiniennes dans le quartier musulman, se sont vu confier par les autorités israéliennes, le statut de "gardes officiels" sur un site archéologique du quartier musulman.
Avril 1999: Les israéliens ferment la Maison d'Orient, siège officieux de l'OLP à Jérusalem-Est, après y avoir interdit une visite de diplomates étrangers.
Ecoutons Youssef Jaraïsseh, palestinien déporté en 1948 à la suite des attentats anti-arabes perpétrés par l'Irgoun et le groupe Stern, respectivement commandés par Menahem Begin et Itzhac Shamir, revenu sur les lieux de son enfance:
"Mon Dieu, c'est là C'est celle-là. Pardonnez-moi, je" Youssef s'est éloigné de quelques pas. Un homme aux cheveux blancs sanglote comme un enfant, et l'on ne sait plus où poser le regard. Après des heures de recherches, Youssef Jaraïsseh vient de retrouver ses souvenirs d'enfance.
Le sentier couvert de pins dénommé Wahar Katamon où vivait le petit Youssef est devenu un parc baptisé "The Israel Goldstein Youth Village of Hanoar Hatzion , dont l'entrée est surmontée de deux grandes oriflammes frappés de l'étoile de David, et dans lequel une plaque indique "En remerciement à l'organisation Hadassah des femmes sionistes d'Amérique".
Les Nations Unies considèrent et ont jugé que la "nomination" de Jérusalem comme capitale de l'Etat d'Israël est nulle et non avenue, mais Madeleine Albright, secrétaire d'Etat américain n'a cure des décisions onusiennes.
Elle déclarait le 14 juillet 1999: "Un accord entre Jérusalem et Damas ou entre Jérusalem et Gaza n'est pas moins difficile qu'un accord entre New Dehli et Islamabad, ou entre noirs et blancs en Afrique du Sud."
Pour Madame Albright, et les Etats-Unis au nom desquels elle s'exprime, Jérusalem est la capitale de l'Etat d'Israël.
Juifs, Chrétiens, Musulmans, Bouddhistes, Hindouistes, Athées, quelques soient les croyances, les convictions, les systèmes politiques, l'humanité de tous les hommes a des droits et des devoirs à l'égard de son patrimoine commun.
Jérusalem, la ville des Lieux saints des trois grandes religions monothéistes fait partie de ce patrimoine, et il est intolérable et révoltant qu'une poignée de fanatiques humanicides, érigés en Etat par la violence, et instrumentalisés pour des intérêts économiques et financiers, en fasse sa propriété privée, dans le but d'en faire disparaître ses habitants, le peuple palestinien, à coups de dollars.